Page:Aimard - Ourson-tête-de-fer.djvu/196

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— Celui-là même ; Lilia.

— C’est un sombre visage, que celui de cet homme, dit la jeune fille, d’un air pensif.

— N’est-ce pas ? Eh bien, sais-tu à qui il ressemble, et cela d’une manière si surprenante que j’en fus frappée la première fois que je le vis ?

— Non.

— Cet homme ressemble traits pour traits, je te l’affirme, au misérable bandit dont, au Port-Margot, les chances du jeu nous avaient faites les esclaves.

— C’est étrange murmura doña Lilia.

— Oh ! oui, bien étrange ! s’écria-t-elle avec une animation fébrile, et malgré sa barbe coupée à l’espagnole, son accent andalou et l’air de fausse bonhomie répandue comme un masque sur ses traits, je ne m’y suis pas laissée prendre une minute, moi, et, dès le premier instant, j’ai compris que cet homme me serait fatal.

— Cependant…

— Laisse-moi achever, querida, tu verras si mes pressentiments m’ont trompée. Don Torribio Moreno, du reste, est un homme d’une élégance parfaite, de hautes manières, et en apparence, du moins, colossalement riche ; l’or coule comme de l’eau entre ses doigts.

— Ajoute que c’est un joueur effréné, et de plus un joueur heureux.

— C’est à cela que je voulais arriver. Mon père, lui, n’est pas riche, tu le sais cependant il a la