Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/343

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— Nullement, j’ai votre parole ; je remplis les ordres que j’ai reçus, voilà tout.

Le marquis, sans répondre, porta d’un geste brusque le flacon à ses lèvres et le vida d’un trait.

Il chancela, son regard se troubla, une pâleur livide envahit son visage.

— C’est fait ! dit-il d’une voix hachée ; reprenez ce flacon, il ne faut pas qu’on le trouve ici.

Il tomba assis sur le bord de son lit ; des gouttelettes de sueur perlaient à ses tempes.

— Hâtez-vous ! s’écria-t-il, la lettre ?

— La voici ! dit don Sylvio Carvajal en la lui remettant.

— Enfin ! s’écria-t-il avec une expression de joie délirante, elle est sauvée !

Au cri poussé par le marquis, Olivier était accouru.

— Qu’avez-vous ? lui demanda-t-il avec épouvante.

— J’ai que je meurs, répondit-il ; ne le saviez-vous pas, mon frère ?

Tout en parlant, d’une main tremblante il avait ouvert la lanterne posée sur la table, et avait présenté le papier à la flamme de la chandelle ; il ne le lâcha que lorsqu’il fut entièrement consumé.

Un soupir, ressemblant à un sanglot, souleva péniblement sa poitrine.

— C’en est fait ! le sacrifice est consommé ! murmura-t-il avec un indicible attendrissement. Après un instant, il ajouta : Adieu et merci, mon frère, soyez béni ; merci à vous aussi, dit-il à don Sylvio Carvajal, je vous dois de ne pas mourir désespéré !

Olivier et le chef de la police, si coupable que