Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/379

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demi engloutie dans les tripots où la passion du jeu l’entraîne chaque jour, et qu’il entrevoit déjà la misère étendre vers lui ses doigts crochus. S’il a sollicité du ministre une mission en France, ce n’est pas pour essayer de rétablir cette fortune perdue : non ; c’est parce qu’il a commis une action honteuse, un crime odieux, qu’il n’est pas certain que l’impunité lui soit acquise, et qu’il a peur.

— Mon cousin !…

— Pardonnez-moi, ma cousine ; je vous aime et je vous admire, parce que vous êtes aussi bonne et aussi loyale que vous êtes belle, et qu’en somme ce n’est pas votre faute si la fatalité vous a enchaînée à un misérable.

— Mon cousin s’écria-t-elle avec douleur en cachant son visage dans ses mains.

— Il faut que vous sachiez bien quel homme infâme on vous a donné pour mari, ma cousine ; cet homme auquel mon père avait remis en fidéicommis une somme de 600,000 piastres fortes pour m’être remise à moi, savez-vous ce qu’il a fait ? il a soustrait la lettre contenant le reçu de cette somme, il l’a brûlée ici même, dans cette pièce où nous sommes ; et lorsque mon père lui a réclamé son dépôt, il a nié l’avoir reçu.

— Oh ! ceci est infâme, en effet, si cela est ; mais je ne puis le croire, il m’a juré sur son honneur…

— Son honneur ! s’écria Olivier avec une mordante ironie.

Et ouvrant une cassette en fer, posée près de lui sur la table, il en tira un papier, et le présentant tout ouvert à la duchesse :