Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/122

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il est très prouvé, et très mal prouvé, qu’on avait des ennemis, puisqu’on en a. L’enfant n’est guère plus naïf que l’homme.

Je suppose que les jeux à se cacher, à chasser la bête, à imiter le cri de la bête finissent souvent mal ; mais l’enfant n’en dit rien ; il aperçoit la frontière, il n’entre point dans le pays de la peur. Je remarque bien de la convention dans ce genre de jeux, comme au théâtre. J’ai vu plus de simplicité dans un très jeune enfant qui jouait à main chaude, frappait fort, se faisait mal, s’irritait, et frappait d’autant plus. Ce cours est celui des crimes. Mais il faut se retenir, en quelque sorte, dans le monde des signes, si l’on veut comprendre les religions ; car la réplique du semblable et des choses les change aisément en folie, ce qui tue dieux et diables, ces invisibles. Je me souviens d’un jeu qui finissait mal, mais seulement par la peur. La bonne se couvrait d’une descente de lit en peau de loup ; elle nous poursuivait en grondant