Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment l’atome, idée éternelle du changement extérieur à lui-même. Car l’atome n’est rien que le point de matière, gros ou petit, il n’importe, qui est seulement heurté ou poussé par d’autres atomes, sans que l’atome ait jamais d’autre propriété en lui-même que celle d’être ainsi heurté ou poussé, ce qui fera lumière, feu, océan, terre, végétaux, et l’homme même autant qu’il est chose ; car l’homme est chose, et l’esprit n’est que plus fort par cette vue strictement matérialiste. Je nettoie encore Lucrèce ; je le remets dans son propre chemin, double chemin où Descartes a marché sans peur aucune. Il n’y a point du tout de magie dans Descartes ; mais, comme nous avons été enfants avant d’être hommes, Lucrèce est à lire avant Descartes, et Homère avant Lucrèce, et premièrement les Contes de ma mère l’oie.

Si l’erreur n’était pas naturelle, il faudrait désespérer de l’esprit humain ; tel est le règne des faux dieux, selon lequel