Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/183

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préhensible ; et c’est vrai en gros ; mais la religion réelle n’agit jamais en gros ; elle ne pense jamais en gros. L’homme contourne les contradictions comme il contourne les troncs et les rochers, toujours appliqué à l’obstacle et imitant l’obstacle ; toujours au plus près. Ce geste de potier, de sculpteur, et de prêtre, c’est le rite, et c’est le culte. L’homme y est tenu par lui-même, et chacun de ses mouvements est composé. Tel est le sens de l’immobilité agreste, qui est un refus de penser. Aussi n’est-il pas aisé de comprendre le culte de la vache, ni l’autel au singe et à l’éléphant. C’est que le corps humain est ici en garde contre la pensée. Qu’on ne puisse improviser devant l’animal, ni se livrer au premier sentiment, cela est d’expérience pour le meneur de vaches encore plus peut-être que pour le dompteur de chevaux. Cette nature nous impose d’immuables formes. C’est ainsi que les sculpteurs trouvèrent l’immuable forme, et le vrai style, qu’ils