Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/188

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sables, soit par les glaciers et les pics neigeux, soit par l’exubérance végétale ou animale, soit par l’excès des masses humaines en effervescence. En toutes ces circonstances, l’homme se sent petit et faible ; mais il rebondit de tout son esprit ; il essaye son pouvoir de braver et d’oser ; il le trouve sans limites. La peur est vaincue. La mort est vaincue. Tel est le sentiment du sublime, et il y a du sublime dans tous les excès. L’ivresse ne peut être médiocre dans un être qui pense. Tel est le genre de folie qui nous porte au spectacle des choses effrayantes et inhumaines. Nous voudrions un pic plus sauvage, des vagues plus hautes, une solitude plus terrible. Essaie, univers, essaie ! Ce mouvement nous porte au risque, à l’ascension, au vol, à la guerre, à tous les genres d’exploration. Ce genre de courage réside certainement plus bas qu’on ne croit. Car l’orgueil n’est jamais d’esprit seulement ; le héros sent tout au moins une provision de tem-