Page:Alcott - Jack et Jane.djvu/117

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
91
LA MISSION DE JANE.

une sorte de télégraphe invisible et que chacun de vous est au courant des pensées de l’autre, sans avoir besoin de parler.

— Je n’avais rien d’autre à lire, » répondit Jane toute honteuse de ce compliment immérité.

La petite fille enfouit sa figure dans son livre en voyant Mme Minot chercher sa lettre commencée, et elle ne s’aperçut pas du regard qui lui fut jeté lorsque celle-ci découvrit, collé sur le papier, un petit timbre rouge, témoin de toute l’affaire.

Mme Minot savait que ce timbre était tout près de Jane lorsqu’elle était allée retrouver Jack. Elle avait été au moment de le ramasser pour le porter à son fils, et ne l’avait laissé là que parce qu’elle avait réfléchi que la punition de Frank avait bien son mérite. Elle était donc parfaitement sûre de ne pas se tromper. En outre, elle se rappelait qu’une feuille de papier s’était envolée de dessus la table à ce moment, et était tombée à quelque distance. Or, le timbre et la lettre n’avaient pu se réunir tout seuls. De plus, sur la marge, on voyait la marque d’un petit doigt bleu, et Jane venait justement de dévider de la laine qui déteignait un peu. Tout cela était très clair, et la voix et l’attitude contraintes de Jane ne l’étaient pas moins.

La bonne Mme Minot était toute disposée à lui pardonner son indiscrétion, et cela d’autant plus facilement que la petite fille en était déjà suffisamment punie. Mais la désobéissance avait de grands dangers pour Jane dans l’état de santé où elle se trouvait, et son amie vit aussitôt qu’elle souffrait de corps ou d’esprit, et peut-être des deux.