Page:Alexis de Tocqueville - L'Ancien Régime et la Révolution, Lévy, 1866.djvu/163

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de son arrondissement. » — « Vous avez souvent été obligés, dit-il ailleurs en parlant à ses subdélégués, de réprimer la tendance constamment usurpatrice et envahissante qui caractérise la conduite des villes à l’égard des campagnes et des villages de leur arrondissement. »

Le peuple même qui vit avec les bourgeois dans l’enceinte de la ville leur devient étranger, presque ennemi. La plupart des charges locales qu’ils établissent sont tournées de façon à porter particulièrement sur les basses classes. J’ai eu plus d’une fois occasion de vérifier ce que dit le même Turgot dans un autre endroit de ses ouvrages, que les bourgeois des villes avaient trouvé le moyen de régler les octrois de manière à ce qu’ils ne pesassent pas sur eux.

Mais ce qu’on aperçoit surtout dans tous les actes de cette bourgeoisie, c’est la crainte de se voir confondue avec le peuple, et le désir passionné d’échapper par tous les moyens au contrôle de celui-ci.

« S’il plaisait au roi, disent les bourgeois d’une ville dans un Mémoire au contrôleur-général, que la place de maire redevînt élective, il conviendrait d’obliger les électeurs à ne choisir que parmi les principaux notables, et même dans le présidial. »

Nous avons vu comment il avait été dans la politique de nos rois d’enlever successivement au peuple des villes l’usage de ses droits politiques. De Louis XI à Louis XV, toute leur législation révèle cette pensée. Souvent les bourgeois de la ville s’y associent, quelquefois ils la suggèrent.