un corps dès le lendemain, quand on le vit patronner Ledru-Rollin, et forcer la main à ses propres amis pour obtenir d’eux qu’ils lui donnassent celui-ci pour collègue dans la commission exécutive. À cette vue, ce fut dans l’Assemblée et dans la nation un désappointement, une terreur et une colère inexprimables. Je ressentais, pour ma part, ces deux derniers sentiments au plus haut point ; je voyais clairement que Lamartine se détournait du grand chemin qui nous menait hors de l’anarchie, et je ne pouvais deviner dans quel abîme il allait nous conduire en suivant les voies détournées qu’il prenait ; comment prévoir, en effet, où peut aller une imagination toujours bondissante que la raison ou la vertu ne limitent pas ; le bon sens de Lamartine ne me rassurait pas plus que son désintéressement ; et, en fait, je le tenais pour capable de tout, excepté d’agir lâchement et de parler d’une façon vulgaire.
J’avoue que les journées de Juin modifièrent un peu l’opinion que j’avais alors de sa manière d’agir ; elles me montrèrent que nos adversaires étaient plus nombreux, mieux organisés et surtout plus déterminés que je ne le croyais.
Lamartine n’ayant vu depuis deux mois que Paris et y ayant habité pour ainsi dire dans l’intérieur même du parti révolutionnaire, s’exagérait la puissance de celui-ci et l’inertie de la France, il dépassait, en cela,