« Parle donc, pompier ! » Il ne disait mot et on finit par le chasser de la tribune. En ce moment, plusieurs hommes du peuple saisirent Louis Blanc dans leurs bras et le promenèrent ainsi en triomphe dans la salle. Ils le tenaient par ses petites jambes au-dessus de leurs têtes ; je le vis qui faisait de vains efforts pour leur échapper, il se repliait et se tordait de tous les côtés sans pouvoir glisser d’entre leurs mains, tout en parlant d’une voix étranglée et stridente ; il me faisait l’effet d’un serpent auquel on pince la queue. On le posa enfin sur un banc au-dessous du mien. Je l’entendis qui criait : « Mes amis, le droit que vous venez de conquérir… » Le reste de ses paroles se perdit dans le bruit. On me dit que Sobrier était porté de la même manière un peu plus loin.
Un événement bien tragique faillit interrompre ces saturnales : tout à coup les tribunes du fond de la salle craquèrent, penchèrent de plus d’un pied, et menacèrent de verser dans la salle la multitude qui les surchargeait et qui les abandonna avec épouvante. Cet incident effrayant suspendit un instant le tumulte et j’entendis pour la première fois alors, dans le lointain, le bruit des tambours qui battaient le rappel dans Paris. La foule l’entendit comme moi et elle poussa un long cri de colère et de terreur. « Pourquoi bat-on le rappel ? s’écrie Barbès hors de lui et se faisant de