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Page:Alexis de Tocqueville - Souvenirs, Calmann Levy 1893.djvu/43

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l’affût puisse rencontrer le gibier à portée ; je sentais peu de goût pour me mêler à cette chasse. Mais, la principale et sérieuse raison qui me retint était celle-ci : je la déduisis bien souvent alors à ceux qui voulaient m’entraîner dans ces réunions politiques.

« Pour la première fois depuis dix-huit ans, disais-je, vous entreprenez de parler au peuple et vous cherchez votre point d’appui en dehors de la classe moyenne ; si vous ne parvenez pas à agiter le peuple (ce qui me semblait le résultat le plus probable), vous deviendrez encore plus odieux que vous ne l’êtes déjà aux yeux de ceux qui gouvernent et de la classe moyenne qui, en majorité, les soutient et vous affermirez ainsi l’administration que vous voulez renverser ; si vous parvenez, au contraire, à agiter le peuple, vous ne pouvez pas plus prévoir que moi où doit vous conduire une agitation de cette espèce. »

À mesure que la campagne des banquets se prolongeait, cette dernière hypothèse devenait, contre mon attente, la plus vraisemblable. Une certaine inquiétude commençait à gagner les meneurs eux-mêmes, inquiétude vague, il est vrai, qui traversait leur esprit sans s’y fixer. J’appris de Beaumont, qui alors était l’un des principaux d’entre eux, que l’agitation créée