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Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/66

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dépouillé de sa dignité, que lorsqu’un autre courtisan plus rusé que lui, a sçu lui faire perdre la faveur du tyran ; mais, de quelque manière que cette disgrâce ait lieu, elle arrive enfin, et alors il faut que l’état se prépare à supporter le nouveau ministre, qui, devant toujours être de quelques degrés plus méchant que le premier, a besoin, pour se faire croire meilleur, de changer, de renverser l’état de choses établi par l’autre, pour se montrer en tout dissemblable à lui ; et cependant ce ministre veut et doit vouloir, comme son prédécesseur, et s’enrichir et se maintenir en place, et se venger et tromper, et opprimer et terrasser. C’est pourquoi tout changement dans la tyrannie, soit du tyran, soit du ministre, n’est autre chose, pour un peuple malheureusement esclave, que le changement de ligatures et de chirurgien pour un malade couvert d’une plaie immense et incurable, changement qui ne fait qu’en renouveler les exhalaisons fétides et les spasmes.

On peut démontrer avec la même facilité, que le ministre successeur doit être un peu plus méchant que celui qu’il remplace. Pour l’emporter sur un homme méchant, puissant et rusé, il est nécessaire de le vaincre en