Aller au contenu

Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
5
6
AARON

quons que, pour fortifier dans le Christ l’infirmité de la loi, Dieu a élevé Aaron au ministère sacerdotal, afin de l’associer utilement à l’œuvre rédemptrice de Moïse. La loi est trop faible pour sauver et sanctifier les hommes ; le Christ avec la coopération des prêtres est le salut et la sanctification du monde. Dieu enfin a revêtu Aaron d’ornements sacerdotaux variés, afin de marquer par ces figures la gloire de notre Sauveur. L’évêque d’Alexandrie développe ensuite assez longuement le symbolisme mystique des vêtements sacerdotaux d’Aaron. Saint Cyrille de Jérusalem, Cal., x, P. G., t. xxxii, col. 676, se borne à affirmer le caractère figuratif d’Aaron. Jésus-Christ, dit-il en substance, a deux noms ; il est appelé Jésus, parce qu’il est Sauveur, et Christ, parce qu’il remplit les fonctions du sacerdoce. Or, pour représenter les deux pouvoirs, royal et sacerdotal, réunis dans la personne de Jésus-Christ, Moïse a donné au fils de Navé, son successeur, le nom de Jésus, et à son frère Aaron celui de Christ. Le Christ, en effet, est comme Aaron souverain pontife. Plus loin, Cat., xii, col. 761, il compare la virginale maternité de Marie à la verge fleurie d’Aaron et il fait ce raisonnement : « Celui qui, en raison d’un souverain pontife figuratif, Sià -rôv tUTttxôv àpytepéa, a fait porter des Heurs et des fruits à une branche sèche et décortiquée, n’accordera-t-il pas à une vierge d’enfanter, en raison du véritable grand-prêtre, 81à tôv à/Y|81vôv àpytspéa ? » L’auteur des Constitutions apostoliques, l. II, c. XXX, P. G., t. I, col. 677, a considéré Aaron comme la figure des diacres. A ses yeux, Moïse représentait l’évêque, et comme Aaron était le prophète et l’interprète de Moïse, il en conclut que le diacre est le prophète de l’évêque et ne doit rien faire sans son ordre et sa direction. Les Pères latins ont indiqué d’autres rapprochements entre les deux prêtres, Aaron et Jésus-Christ. Saint Ambroise a décrit plusieurs fois le caractère figuratif de cette belle scène biblique d’Aaron, debout entre les vivants et les morts et arrêtant par son intercession la marche du lléau dévastateur. Aaron représentait alors le Christ Jésus. « N’est-ce pas la principale fonction du Christ d’être auprès du Père l’avocat des peuples, d’offrir sa mort pour tous, de chasser la mort et de rendre la vie à ceux qui l’ont perdue ? » In Ps. xxxix enarrat., n. 8, P. L., t. xiv, col. 4060. Le grand-prêtre juif figurait dans cette circonstance le Christ, prêtre éternel selon l’ordre de Melchisédech, venant au milieu des hommes pour apaiser Dieu. De xlii mansionibus filioruni Israël, P. L., t. xvii, col. 25. De même qu’Aaron empêchait la mort de passer du corps des victimes à ceux qui étaient encore vivants ; ainsi le Verbe, présent invisiblement en chacun de nous, y sépare les vertus du cadavre des passions et des pensées pest-ilentielles. Il se tient debout comme s’il était venu en ce monde pour émousser l’aiguillon de la mort, fermer le gouffre béant prêt à nous dévorer, donner l’éternité de la grâce aux vivants et accorder la résurrection aux morts. Epist., iv, n. 5, P. L., t. xvi, col. 890. Les douze pierres précieuses du vêlement d’Aaron, qui est la figure du Christ, sont insérées dans le vêtement de tout véritable prêtre. De fide, l. II, prolog., n. 4, P. L., t. xvi, col. 560. La verge desséchée d’Aaron, qui pousse et fleurit, représente la chair du Christ ; elle était sèche et elle a refleuri, puisque morte elle est ressuscitée. De xlii mansionibus, P. L., t. xvii, col. 25. Cette verge, déposée dans le tabernacle, yest l’insigne de la grâce sacerdotale. Elle avait été desséchée, mais elle a refleuri dans le Christ. Epist., iv, n. 4, P. L., t. xvi, col. 890. Celle verge qui fleurit seule au milieu des verges des autres tribus, nous montre que chez les prêtres la grâce divine fait plus que les talents humains ; elle montre aussi que la grâce sacerdotale ne dépérit jamais et que dans sa faiblesse elle est capable de produire les fleurs des pouvoirs qu’elle a charge d’exercer. Ce miracle s’est produit au déclin de la vie d’Aaron pour signifier que le peuple juif, vieilli par la longue infidélité de ses prêtres, refleurirait par la foi et la dévotion et revivrait par la grâce, après des siècles de mort. Epist., i.xiii, n.58, col. 1204. La verge d’Aaron signifie encore, que l’autorité sacerdotale doit être droite et doit persuader ce qui est utile plutôt que ce qui est agréable. Les préceptes des prêtres peuvent bien paraître amers pour un temps â plusieurs, et n’être pas entendus de leurs oreilles, mais enfin comme la verge d’Aaron, ils refleurissent alors qu’on les croyait desséchés, Epist., xli, n. 2 et 3, col. 1113. L’auteur du Liber de promissionibus et prsedictinnibus Dei, l. ii, c. x, P. L., t. li, col. 779-780, reconnaît dans la verge fleurie d’Araon Jésus-Christ prêtre et dans ses fruits le monde et l’Église. Saint Grégoire le Grand, Hom. in Evang., . II, homil. xxxiv, n.8, P.L., t. lxxvi, col. 1244, traduit le nom d’Aaron par « montagne de force » et il reconnaît dans cette forte montagne notre rédempteur. Quand Aaron soutenait avec Hur sur la montagne les mains de Moïse, il figurait le médiateur établi entre Dieu et les hommes, qui est venu alléger, en les spiritualisant, les lourds fardeaux de la loi ancienne que la chair ne pouvait porter. Saint Isidore de Séville, Allegorise quaidam Scripturse sacrée, n. 60, P. L., t. lxxxiii, col. 109, a considéré dans Aaron le sacrificateur. Lorsqu’en répandant le sang des victimes il expiait les péchés du peuple, il représentait Jésus-Christ qui a effacé les péchés du monde par l’effusion de son sang. Alcuin, InPs. cxxxit, 2, jP. L., t. c, col. 637, a vii, dans Aaron, le Christ qui pénétra seul dans le Saint des Saints, non avec un sang étranger, mais avec le sien propre, afin d’intercéder pour nous auprès du Père. L’huile parfumée, qui découle de la tête du Christ, c’est le Saint-Esprit, qui se répand sur tous ceux qui ont victorieusement combattu pour lui, les apôtres, les martyrs et les fidèles sanctifiés, aussi bien que sur l’Église, qui est un vêtement teint dans le sang du Sauveur. Aux yeux de saint Pierre Damien, Collectanea in Velus Testamentum, In Num., c. i, jP. L., t. cxlv, col. 1034-1035, Aaron et ses fils représentent les pontifes de la loi nouvelle, et les lévites, les clercs. Ceux-ci sont séparés des laïques et destinés au ministère sacré, quand ils sont offerts â leurs pontifes pour l’ordination. Pour Richard de Saint-Victor, Adnotatio in Ps.xcvui, P. L., t. exevi, col. 331, Aaron, dont les principales fonctions étaient de rendre Dieu propice par la prière et le sacrifice, représente le nouveau sacerdoce qui doit pleinement apaiser le Seigneur. Philippe de Harveng, De dignitate clericorum, c. ii, P. L., t. cem, col. 669, retrouvait dans Aaron et ses fils toute la hiérarchie catholique, Aaron figurait les évêques, ses fils les prêtres et les lévites les simples clercs. Tous étaient choisis parmi le peuple chrétien ; une fois qu’ils en avaient été séparés, ils devaient mener une vie sainte. Rupert, Comment, in Matlh., l. III, P. L., t. clxviii, col. 1368-1369, avait découvert un aspect nouveau. Avant de remplir les fonctions sacerdotales, Aaron était obligé de se purifier et de prendre ses ornements sacrés. Il était ainsi la figure du souverain et véritable prêtre, Jésus-Christ, qui au début de son ministère avait voulu être baptisé par saint Jean-Baptiste.

Dans l’iconographie chrétienne. —

Nous ne connaissons pas d’images antiques reproduisant le caractère typique d’Aaron. Signalons seulement qu’à Rome, au xvie siècle, on a représenté symboliquement le sacerdoce chrétien par la verge d’Aaron qui fleurit au milieu de verges desséchées. En 1610, L. Gauthier gravait, pour le frontispice de la Royale Prestrise de Pierre de Besse, les deux sacerdoces de l’ancienne et de la nouvelle loi, Aaron, avec l’encensoir, regale sacerdotium, et un pape, tenant d’une main l’ostensoir et de l’autre la croix à triple croisillon. Mgr X. Barbier de Montault, Traité d’iconographie chrétienne, in-8o Paris, 1890, t. I, p. 325 ; t. ii, p. 47.

C’est ainsi que s’est toujours conservé et que s’est développé dans des directions un peu divergentes le caractère figuratif du sacerdoce d’Aaron. Le grand-prêtre