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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.2.djvu/583

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PATRICE (SAINT]

aucun des traits que Patrice avait essayé de lui donner. Plus puissamment qu’ailleurs, l’organisation politique, sociale, économique du pays a influencé l’organisation ecclésiastique ; elle a donné à la chrétienté irlandaise du haut Moyen Age des caractères qui persisteront longtemps. Mais cela ne veut pas dire, comme l’a pensé Zimmer, qu’il n’y eut pas au milieu du ve siècle une action exercée en sens contraire par saint Patrice, pour donner à cette Église une conformité plus grande avec l’Église universelle.

II. Œuvres littéraires. — Patrice n’a rien d’un homme de lettres et les quelques productions authentiques sorties de sa plume ne témoignent que d’une très médiocre culture.

1° Tout le monde, ou à peu près, considère comme authentiques VEpistola ad Coroticum et la Con/essio. P. L., t. lui, col. 813-818 et col. 802-811. La première de ces pièces est une lettre ouverte adressée à un roi picte, chrétien mais pillard. Partie de la côte écossaise, une de ses bandes, composée en majeure partie de païens, avait exécuté un coup de main sur la côte irlandaise ; elle avait surpris une troupe de néophytes, au sortir même de la piscine baptismale, en avait tué plusieurs et emmené les autres prisonniers. Les justes protestations de Patrice contre cet attentat n’ayant pas été écoutées, il adresse au roi en question cette lettre, destinée d’ailleurs à la plus large diffusion et qui met le pillard au ban de la communauté chrétienne. — Plus intéressante encore est la Con/essio, qui est posté-’rieure de quelques années à VEpistola et date des derniers moments de Patrice. Document curieux qui tient à la fois de l’apologie, de la confession au sens propre du mot, de la profession de foi, mais surtout, comme le livre d’Augustin, de l’action de grâces indéfiniment répétée pour les infinies miséricordes de Dieu à l’endroit de l’auteur. Mais, hélas ! combien cette composition chaotique, informe, nous met loin des confidences du fils de Monique ! Destinée comme VEpistola à une large publicité, elle s’adresse à des gens qui, jadis auxiliaires de Patrice, se sont séparés de lui, critiquent sa conduite, reviennent sur des fautes jadis commises par lui, lui reprochent son manque de désintéressement. Elle nous fait entrevoir les difficultés d’ordre divers qu’a dû rencontrer le missionnaire ; mais surtout elle nous révèle son ame, l’attachement de sa volonté à celle de Dieu, son absolue confiance en la divine Providence, la joie avec laquelle il rapporte à celle-ci les succès de son apostolat. — L’authenticité d’une troisième pièce est sérieusement probable, il s’agit d’une de ces prières-talismans, connues dans les Églises celtiques sous le nom de Loricæ : « Une lorica, dit dom Gougaud, est une prière de forme litanique, généralement prolixe…, dans laquelle on réclame en termes pressants la protection des trois personnes divines, des anges et des saints contre les maux et les dangers spirituels ou matériels… Celui qui prie, demande à Dieu ou aux saints de lui être comme une « cuirasse » défensive contre les attaques du diable, d’où le nom de lorica. » Bull, d’ancienne lill. et d’archéol. chrét., 1911, p. 265 ; voir, p. 271, les indications relatives à la Lorica de saint Patrice, qui est en prose rythmée irlandaise ; et ibid., année 1912, p. 33 sq. ; p. 101 sq., un commentaire des diverses parties de la prière, par comparaison avec d’autres Loricæ.

2° Que Patrice ait été amené à prendre des mesures d’ordre canonique et disciplinaire, c’est ce qui est infiniment vraisemblable. Sous son nom figurent plusieurs petits recueils de canons. P. L., t. un, col. 817-828. Au dire de J.-B. Bury, celui qui porte le titre Synodus episcoporum Patricii, Auxilii, Issernini, col. 823. aurait toutes chances d’être authentique. Mais, en général, cette authenticité n’est pas admise ; plusieurs des canons, en particulier le 6°, relatif à la « tonsure ro 2300

maine t, le 30* relatif aux ressorts épiscopaux semblent d’une époque bien postérieure (Bardenhevver). Toutefois, les remarques faites par Bury sur la disparition plus ou moins rapide de beaucoup des mesures édictées par Patrice trouvent ici leur application.

3° On a attribué à Patrice, sans aucune raison sérieuse, diverses pièces : Le traité De duodecim abusinis sœculi, qui figure parmi les œuvres inauthentiques de saint Cyprien, P. L., t. iv, col. 869-882, ou de saint Augustin, P. L., t. xl, col. 1079-1088, et qui est en réalité une pièce d’origine irlandaise, mais du vu » siècle ; le traité De tribus habilaculis, P. L., t. un, col. 831838, qui compte aussi parmi les apocrvphés augustiniens, P. L., t. xl, col. 991-998, et dont l’origine est inconnue ; le Liber angeli, qui n’est pas dans P. L. (le chercher dans Wh. Stokes, Tripartile li/e, p. 352)j et qui est un faux du viiie siècle ; une énumération en 31 vers hexamètres de toutes sortes de présages, dans A. Riese, Anlhologia latina, 2e édit Leipzig’1906, part. I b, n. 791.

I. Sources de la vie de Patrice.

Il n’y a pas de biographie contemporaine ; la Con/essio et VEpistola donnent sur la vie des renseignements précieux ; ils ont été utilisés, en même temps que des traditions moins dignes de foi par deux écrivains irlandais de la fin du vu » siècle, Tirectian Collectanea, et Muirchu, Vita S. Palritii, puis dans la Vità tripartita (en irlandais, mais il y a deux traductions latines) remaniée an xr> siècle. Ces divers textes se trouveront dans Wh. Stokes, The triparlite li/e of Patrick wilh oUxer documents relating lo lhat Saint = Rolls séries, t. lxxxix, 1887 ; Tirechan et Muirchu également dans Analecta bollundiana’t. I, 1882, p. 531-585 ; t. ii, 1883, p. 35-68, 213-238. Sur la valeur de ces sources, J.-B. Bury, Tirechan’s Memoir of St. Patrick, dans Enqlish histor. revieiv, t. xvii, 1902, p. 235-267, 700-704, et aussi l’ouvrage d’ensemble, mentionné ci-dessous.

II. Textes.

1° Sur les anciennes éditions des œuvres de S. Patrice, voir Schonemann, Bibl. hist.-lilt. Patrum lai., t. ii, p. 849, reproduit dans P. L., t. un, col. 795-802. La première édition d’ensemble est celle de James Ware, Londres, 1656, qui a échappe, chose curieuse, aux bollandistes, lesquels publient, en 1668, la Con/essio et VEpistola. Actà sanct., mars t. iii, p. 533-540. L’édition de Ware reste à la base de celles de Gallandi, Bibl. veter. Patrum, t x et de P. L., t. lui.

Éditions modernes.

Con/essio et Epislola, dans A. W.

Haddan et W. Stubbs, Councils and ecclesiaslical documents relating lo Great-Britain and Ireland, t. n b, Oxford, 1878, p. 296 et 314 ; dans Wh. Stokes, The triparlite li/e, p. 357* et 375 ; N. J. D. White, Libri S. Patricii, d’abord dans Proceedings of the R. Irish academy, sect. C, t. xxv, 1904-1905, p. 201-326 ; puis dans la collection Texts for students, n 4 Londres, 1918.

Lorica, dans Haddan-Stubs, op. cit., p. 320 ; Wh. Stokes, op. rit., p. 48 ; J. H. Bernard et J. Atkinson, The irish Liber hgmnorum, t. i, 1898, p. 133 (irland.) ; t. ii, p. 49 (angl.) ; Wh. Stokes et J. Strachan, Thésaurus palœohibernicus, t n’1903, p. 354 (irl. et angl.).

Canones. — Le Synodus episcop., dans Haddan-Stubs, op. cit., p. 328 ; cf. H. Wasserschleben, Die irische Kanunensammlung, 2’édit., Leipzig, 1885.

III. Notices et travaux.

1° Le point de vue ancien est bien représenté dans Tillemont, Mémoires, t. xvi, p. 452-478, 781-787, qui utilise fort judicieusement, à son habitude, les travaux des bollandistes.

2° Parmi les innombrables travaux modernes (voir V. Chevalier, Répertoire, bio-bibliograpliie, col. 3508-3512) signalons seulement ceux qui marquent des points importants : C. Schoell, De ccclesiasticæ Brilonum Scolorumque historiai fontibus, Berlin, 1851 ; F. Lools, De antiquis Brilonum Scolorumque Ecclesiiu moribus, Leipzig, 1882, très radical en ses conclusions ; H. Zimmer, art. Kellische Kirche, dans Protest. Realencuklopàdie, 3e éd., t. x, 1901, p. 207-223 ; du même, Galliens Anleilan Irlands Christianisierung, etc., dans les Silzungtberichte de l’Académie de Berlin, 1909, p. 543-580, 582-613.

Contre cette critique radicale réagit J.-B. Bury, The lift of St. Patrick, Londres, 1905 ; quelques-uns de ses poinls de vue sont contestés par F. F. Warren dans English hislorical review, t. xxi, 1906, p. 347-352 ; Riguet, Saint Patrice (coll.