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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.2.djvu/162

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SEMI-PÉLAGIENS. LA MÊLÉE, PROSPER


1 1. Caui qui ne croient pas à la prédication de l'Évangile, c’est en vertu de la prédestination divine qu’ils n’y croient pas. Dieu a tout arrangé pour que ceux qui ne croient pas

ne croient pas, parce qu’il l’a décrété.

Une comparaison entre les deux séries montrerait que ce sont de pari et d’autre les mêmes objections

faites dans umême esprit : qu’il y a néanmoins dans les Capitula moins d’acrimonie que dans les Objectiones. Quand il est question de ceux qui, parmi les fidèles, ne sont pas prédestinés, les Objectiones parlent toujours de la magna pars et tendent à créer l’impres sion que, à en croire les augustiniens, c’est le tout petit

nombre des chrétiens qui est élu. Plus réservés, les Capitula ne disent jamais, dans ces conditions, magna

>ars. mais seulement quidam (cf. cap. 7. 10, 12, 13).

L’excerpteur des Capitula se montre donc un peu moins injuste que celui des Objectiones â l’endroit de l’augustinisme.

Pour cette raison de fond et aussi pour des raisons stylistiques, il ne nous puait donc pas qu’il faille attribuer au même auteur, quoi qu’en dise H. Koch, ces deux séries de paradoxes destines à décrire l’augustinisme.

A. Le Prsedestinatus. Ne faudrait-il pas rapprocher de ces offensives camouflées contre l’augustinisme le petit ouvrage que, depuis Sirmond. le premier éditeur, on désigne sous le nom de Prxdestinatus ? Voir l’article, t. xii. col. 2775. Ce n’est pas impossible, encore que ce méchant libelle donne l’impression de sortir d’un milieu plus acquis au pélagianisme que celui de Saint-Victor ou de Lérins où l’on faisait profession de condamner et l’on était sincère - Pelage, tins et même Julien d'Éclane. Du moins y a t il de commun entre l’auteur du Prsedestinatus et l’excerpteur des Objectiones Vincent ianai la phobie de la prédestination, l’antipathie la plus déclarée contre la doctrine augustinienne. accusée d'être une source de quiétisme pratique. De commun encore cette sorte de déloyauté qui feint de ne s’en prendre qu'à des conséquences sophistiquement déduites, alors qu’en réalité l’on vise renseignement le plus authentique du Docteur de la grâce.

- I.a contre-attaque de Prosper eontre le pélagianisme renaissant. Aux attaques dont il était l’objet. Prosper répliquait, de son côté, avec une extraordinaire violence. Du moins le faisait il visière levée.

. Le Contra Collatorem I P./… 1. u. col. 21 : 5 -27 1 |. Épluchant les Collationes de Cassien, Prosper eut tôt fait de mettre le doigt sur les passages les plus suspects <le l'œuvre ; ainsi fut-il amené à composer son traité Contre l’auteur des Collationes. dont la date ne peut être lixée que très approximativement (entre 132 e1 140).

L’opposition faite par certains catholiques aux doctrines d’Augustin, ainsi commence-t-il, pourrait amener les simples a penser que les pélagiens ont été injustement condamnés. Pourquoi cette attitude à l'égard du Maître'.' Ceux qui la pivnnent auraient-ils des coin Plaisances pour les vaincus de cette lutte ou triompha

le zèle d’Augustin ? Voudraient-ils faire un choix parmi les opinions condamnées, en retenir quelques unes et rejeter au contraire plusieurs de (elles qui ont vaincu.' C’est de ce point de vue que Prosp t entend examiner la xiir conférence : De protectione Dei, et il n’aura pis de mal a montrer que l’auteur a fourni des armes Hix ennemis de la grâce lue douzaine de propositions sont ainsi relevées dont Prosper poursuit l’exa nien. I.a première es ! Inattaquable : C’est Dieu qui est I principe, non seulement de nos actes, mais de nos lionnes pensées ; c’est lui qui nous inspire les débuts de la bonne volonté et nous donne la force I aussi l’occasion d’accomplir ce que nous désirons ainsi de bien. Mais av tte proposition contrastent les

autres, qui ne vont â rien de moins qu'à la contredire : la 2* sur Dieu qui, voyant en nous une étincelle de bonne volonté. l’ai t ise par son souffle : la : ', sur le libre

arbitre qui, par ses bons mouvements, peut s'élever au moins jusqu’au désir de la vertu ; la P, qui interprète dans ce sens condamnable le mot de l’Apôtre : velle adjacei mihi, perjlcere autem bonum non invenio,

comme si le simple velle etail de nous : la.V'. qui pré tend établir une discrimination entre les procédés de la grâce selon les individus, prévenant les uns, récom pensant chez les autres un début de bonne volonté ; la 6e, qui affirme simultanément la puissance du libre arbitre et celle de la grâce ; la 7 qui voudrait faire croire à la persévérance dans l’humanit é, après la chute, de la connaissance du bien ; les S et 9e enseignant la permanence dans la nature humaine de germes de vertus ; la 10f relative aux abandons où Dieu nous laisse parfois, voulant expérimenter ce que pourra tout seul notre libre arbitre : la 11e qui interprète l'éloge adressé â la foi du centurion par.Jésus, comme si c'était par lui-même que cet homme avait cru au Sauveur ; la 12' enfin qui expose les diverses façons dont nous invoquons Dieu, comme protector, quand c’est lui qui nous appelle, comme susceptor, quand C’esi nous, au contraire, qui l’attirons vers nous par notre bonne volonté initiale.

Récapitulant tout ceci. Prosper traçait le tableau suivant de ce vrai pelagianismus rediuivus :

t’ar le péché d’Adam, l'âme du premier père n’a pas été lésée et il est resté quelque chose de sain dans ce par quoi il a péché, car il n’a pas perdu la science du bien qu’il avait reçue ; sa descendance non plus n’a pu perdre ce que lui-même n’avait pas perdu. De plus, dans toute âme il y a naturellement des geimes de vertu déposés par la bonté du Créateur, de telle sorte que celui qui le veut peut, par son jugement naturel, prévenir la grâce de Dieu et mériter le sec us divin qui Un permet et arri : r plus facilement à la perfection. Aussi bien, celui-là n’aurait ni louange ni mérite qui n’aurait pour sa parure que des biens d’emprunt, non des biens propres. II faut donc se garderde rapporter tellement à Dieu tous les mérites des saints, qu’il semble que la nature humaine ne puisse rien faire de bon par elle-même. Telle est en effet l’intégrité de ses forces, qu’elle peut combattre contre le diable même et toute sa cruauté sans le secours de Dieu. Ce pouvoir (possibilitas) naturel est dans tous les hommes, mais tous ne veulent pas se servir des vertus qui leur sont innées (ingeneratee). Telle est donc la bonté du Créateur à l'égard de tous les hommes, qu’il en reçoit et récompense certains qui viennent à lui spontanément, qu’il en attire maigre eux certains qui résistent ; il est donc le susceptor volentium, le salvator nolentium. E1 puisqu’une partie de l'Église est justifiée ex gratia (en pr< nant son point de départ dans la grâce), une autre pal lie ex libero arbitrio, ceux-là que la nature a fait avancer oui plus de gloire que ceux que la grâce a délivrés, car la volonté est aussi libre pour toute lionne action dans la descendance d’Adam qu’elle ne l'était dans Adam avant le péché. ('.., col. 269.

L’exposé, on le voit, laissant de côté toute la quesi ion de la distribution des grâces, s’attache â mettre en lumière la capacité (fui, au dire de Cassien, est laissée a la nature humaine de faire le bien. Cette capacité est énorme et l’on ne voit guère en quoi cet exposé diffère de celui que faisaient les pélagiens. Mais aussi il est trop évident, pour qui a lu Cassien, que nous avons affaire, ici, avec une caricature de la pensée du Colla tor. Si incohérente qu’elle se révèle en maint endroit. cet te pensée ne fait pas li â ce point de l’enseignement traditionnel. A la car icat tire de l’augustinisme in t< qu’avait crayonnée Vincent, Prosper répliquait par une autre caricature de la doctrine marseillaise.

Le développement qui suit, c. xxi, col. 210, n’est pas moins acerbe : il met tOUl uniment sur le même pied Cassien et Julien d'Éclane, Rappelant tous les actes de l’autorité contre le pélagianisme, Prospei faisait appel contre la malice (pravitas) du moud.'