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SERMENT. CONDITIONS DE VALIDITÉ

le président du tribunal ou le juge délégué rappelle à ceux qui ont jurer, au moins s’ils sont croyants, qu’ils engagent leur responsabilité devant Dieu. (Art. 226 du code de procédure civile, en Italie.) En Allemagne, les témoins sont priés d’ajouter au serment qu’ils émettent la note d’un acte religieux. En France, les témoins jurent devant Dieu et devant les hommes. Pratiquement, suivanl le sujet, le serment sera donc OU profane OU religieux. Cela vaut pour toutes les espèces.

III. Espèces de serment. Le serment qui peut être verbal, c’est-à-dire exprimé en des paroles, ou

réel, s’il est manifeste par une action ou un geste, OU mixte s’il est a la fois verbal et réel, se spécifie surtout d’après l’objet sur lequel il porte, la [orme dans laquelle il s’exprime et le mode de sa prestation.

D’après l’objet, le serment est adirinatif ou promissoire. Il est allirmatif (on dit aussi : assertif), si Dieu est simplement pris à témoin d’une déclaration qui a trait à une chose du passé ou du présent. Le serinent allirmalil est. comme nous l’avons déjà VU, explicite ou implicite, selon que le nom de Dieu est directement ou indirectement invoqué. Il est promissoire s’il concerne l’avenir.

D’après la forme le serment est invocatoire, imprécatoire ou exécratoire. Il est invocatoire s’il est uniquement fait appel à Dieu comme témoin ; il est imprécatoire si Dieu est invoqué non seulement à titre de témoin d’une affirmation, d’une négation ou d’une promesse, mais aussi comme juge et vengeur du parjure. Ce serment est proféré quand quelqu’un souhaite du mal à soi-même ou à d’autres, si la chose n’est pas comme il dit. Les formules peuvent d’ailleurs varier. Ce sera par exemple : « Que Dieu me damne si je ne dis pas vrai ! », « Que Dieu me soit en aide et son saint Évangile ! » Celui qui prononce ces formules se souhaite du bien, s’il dit la vérité, et des malédictions, s’il ne la dit pas : or, comme il n’est pas dans les coutumes humaines de vouloir sérieusement du mal pour soimême et pour ses amis, et que tout serment expose celui qui le fait au jugement divin, il ne semble pas pratiquement que le faux serment imprécatoire puisse spécifiquement différer du parjure, simple.

Enfin, d’après le mode de prestation, le serinent est simple ou solennel. Il est simple s’il est proféré sans aucun cérémonial. Il est solennel s’il est émis avec quelque apparat extérieur, par exemple en touchant les saints Evangiles, eu tendant le bras, en élevant la main devant le crucifix ou des cierges allumés, etc., S. Alphonse, op. cit., t. III, n. 1 10-141 ; il l’est aussi s’il est produit devant un prélat, un juge, un notaire, etc. Canoniquement, le serment doit être émis personnellement ; aucune procuration n’est admise : Jusjwanilum quod canones exigunt vel admit tunt, per procuratorem prsestari valide nequ.it. ('.an. 1316, S 2.

IV. Conditions m. validité. - Pour qu’un serment promissoire soit valide, certaines condil ions sont requises de la part du sujet et de la part de la chose promise.

1° De lu port (la sujet qui prèle serinent. - Il est nécessaire que le sujet ail. de ce qu’il promet par Serment, une notion au moins suffisante ; niais il n’est pas requis que celle ci soit distincte. L’acte ne vaudrait pas si celui qui le pose était dans l’erreur sur la

substance, sur la cause finale ou sur une circonstance

qui en change nol ahlenient l’essence, étant donne que,

en l’occurrence, il n’y a pas « le consentement in sub stantiam. Mais ce consentement existerait si le sujet se trompai ! sur des circonstances de minime importance,

s. Alphonse, np. cit., t. III, " 198, ou sur les qualités accidentelles ou accessoires de la chose.

Il est essentiel aussi que le sujet ait au moins la

volonté implicite de s’obliger, sinon il ne saurait y

avoir qu’un simple propos ; cf. S. Thomas, //( /V an >, dist. XXXVIII, q. i. a. 1, sol. 1. ad 2°"'

Ceci suppose que l’agent a sa pleine liberté, car un acte humain pleinement délibéré est requis pour contracter une obligation grave. S. Alphonse, op. cit., I. III, n. 196. Celui qui fait serment en toute liberté se lie d’une obligation spéciale de religion. Code, can. 1317. § 1 : Qui libère jurai se aliquid facturum, peculiari religionis obligatione tenetur implendi </ao<l jurejurando firmaverit.

De soi la violence ou la crainte grave, même si elles sont à l’origine du serment, ne s’opposent pas à la validité, mais elles peuvent donner lieu à une intervention libératrice de la part de l’autorité compétente. Ainsi en a décidé le Code, can. 1317, S 2 :.1 asjarainlain per vint aul inetum gravem extortum raid, sctl a sujieriore ecclesiastico relaxari potest. Sur ces points, il y eut longtemps désaccord entre les théologiens : les uns pensaient qu’une promesse extorquée par la violence ou la crainte (qui ne mettaient pas le sujet hors de lui-même) n’obligeait pas, car ils la considéraient ou comme nulle de plein droit ou comme susceptible d'être annulée par celui qui l’avait faite. D’autres en plus grand nombre, à la suite de saint Thomas, 11'II æ, q. i. xxxix, a. 7, ad 3um, et de saint Alphonse, op. cit., t. III, n. 171, estimaient que d’une manière générale le serment fait sous l’empire de la crainte était obligatoire au for intérieur, mais qu’on pouvait recourir à l’autorité ecclésiastique pour en obtenir dispense et que, dans le cas où l’on aurait payé ce qu’on a promis, on pouvait le réclamer en justice ou user secrètement de compensation. Comme on le voit, c’est cette seconde opinion qui a triomphe. Les conditions requises de la part du sujet pour qu’un serment soit valide permettront de mieux saisir la valeur de celui qui n’est que fictif.

Le serment fictif est-il valide ? - Un serment est fictif, si celui qui l'émet n’a nullement l’intention de jurer ou refuse intérieurement de se lier et de contracter une oblig il ion. C’est un acte purement externe, l.a simulât ion est un péché grave de sa nature, car l’agent Usurpe en vain le nom de Dieu et trompe les autres. S. Alphonse, op. cit.. t. III, n. 172. Le serment fictif est illicite et le pape Innocent XI a condamné la proposition suivante : ('.uni causa licitum est jurarc sine anima jurundi. sire rrs sit levis sire gravis. Denz.Bamrw., n. Il7â. Un serment fictif émis pour confirmer ce qui est faux constitue un péché mortel, car il inclut une grave irrévérence a l'égard de Dieu, qui est pris à témoin de ce qui n’est pas vrai ; s’il est produit pour confirmer le vrai, il n’est plus probablement

que faute légère, car. de soi. il ne semble pas que Dieu,

en l’occurrence, soit offensé gravement, parce qu’il est

pris à témoin seulement « l’une manière externe, d’une chose qui d’ailleurs est vraie. Il p mirait cependant y avoir faute grave si le serment était ordonné par une autorité légitime ou si le prochain devait en subir des conséquences fâcheuses et importantes. S.Alphonse, ibid.

Du fail que le serment lietif est invalide, il n’oblige pas de soi. Par accident, il pourrait cependant créer une obligation grave, si le prochain devait être déçu sérieusement ou si la iinu exécution d’une promesse devait causer nu grave scandale.

Il est des cas cependant, a propos des taxes fiscales entre autres, où. a cause même des circonstances et maigre les apparences, il ll’j a pas de simulation. Il eu est encore ainsi, lorsque, par exemple, il y a des raisons suffisamment graves qui imposent le silence relativement à des points sur lesquels on est interrogé et lorsque l’on ne peut pratiquement s’abstenir de

donner une réponse. Ces paroles alors employées sont ambiguës et traduisent tout aussi bien leur sens ordi-