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SOCINIAMSMK


essentia divina esse non possunt. Catéchisme de Rakow, question lxxii.

Christologie.

Citons ici le texte même du Catéchisme de Rakow, à titre de spécimen de sa rédaction,

et parce que le problème christologique nous situe au centre de la doctrine socinienne, dans ses caractères différentiels :

Enseignez-moi ce que je dois croire de Jésus-Christ ?

— Bien. Tu dois donc savoir seulement, qu’il y a deux chosos que l’on doit connaître du Seigneur Jésus. L’une regarde sa personne, l’autre sa mission.

— Qu’est-ce qui regarde sa personne ?

— Ceci, que, selon sa nature, il est un homme véritable, ainsi que la sainte Écriture l’enseigne à maintes reprises et en particulier dans les passages suivants : « Il est un médiateur de Dieu et de l’homme, l’homme Christ-Jésus. » I Tim., il, 5. Et dans un autre endroit : « Puisque par un homme la mort (est venue), de même par un homme la résurrection des morts. » I Cor., xv, 21.

Au surplus, Dieu l’avait dès longtemps annoncé ainsi et c’est do la sorte aussi que le professe la confession de foi que l’on appello le Symbole des apôtres, que toute la chrétienté admet avec nous.

— Ainsi donc, le Seigneur Jésus n’est qu’un homme ?

— Pas du tout ! Car, il a été conçu du Saint-Esprit et il est né de la vierge Marie et par conséquent il est aussi, par sa conception et sa naissance, Fils do Dieu, comme on peut ie liro en saint Luc, i, 35.

— Vous m’avez dit plus haut que le Seigneur Jésus, selon sa nature, est un homme. N’a-t-il pas aussi la nature divine ?

— Non, il ne l’a pas. Car cela n’est pas seulement contraire à la droite raison, mais c’est aussi contraire à la sainte Écriture.

— Montrez-moi comment cola est contraire à la droite raison ?

— Premièrement, en ce que deux essences dont les propriétés sont opposées les unes aux autres ne peuvent aucunemont être unies en une seule personne, comme ici : être mortel et immortel ; avoir un commencement et être sans commencement ; être changeant et être immuable. En outre, en ce que deux natures dont chacune est une personne ne peuvent pas être unies en une seule personne, car autrement elles ne devraient pas être une seule personne mais deux et Il y aurait deux Christs. Or, tout le monde sait qu’il n’y a qu’un seul Christ et qu’il n’a qu’une personnalité.

— Mais si on nous objecte que le Christ est fait de la nature divine et de la nature humaine, tout comme l’homme est fait de la réunion de l'âme et du corps, quo doit-on répondre ?

— On doit leur prouver que ce sont là deux choses bien différentes : ils disent en effet quo les deux natures dans le Christ sont unies de telle sorte que le Christ est à la fois Dieu et homme..Mais l’ame et le corps, dans l’homme, sont unis de telle sorte quo l’homme, à proprement parler, n’est ni l'âme ni le corps, puisque l'âme ne constitue pas une personne ni le corps. De même donc que la nature divine, selon leur opinion, constitue une personne à elle seule, dans le Christ, de même la nature humaine doit pareillement constituer une autre personne.

— Montrez-moi aussi comment il est contraire à la sainte Écriture que le Christ possède la nature divine ?

— Premièrement en ce que la sainte Écriture montre qu’il n’y a qu’un seul Être qui par nature ost Dieu. Nous avons prouvé plus haut que celui-là est le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ, En second lieu, parce que la mémo Écriture prouve que h' Christ, par sa nature, est un homme, comme il a été brièvement établi ci-dessus, elle lui enlève donc par le fait même la nature divine. En troisième lieu, la même Ecriture atteste que, tout ce que le Cluist a de divin.il le tient d’un don 'le son Père. Et enfin la même Écriture nous enseigne que cette nal me divine serait dans le Christ sans effet et sans cause, puisqu’elle atteste que le Seigneur Jésus lui-même a attribué toutes ses œuvres divines non à luimême, ni a une nature divine, niais a son Père.

— Et pourtant les hommes s’efforcent do prouvor par

l’Ecriture cette nature divine dans le Christ ?

— Ils s’efforcent en effet de faire cela. Et premièrement on ce qu’ils veulent prouver par l'Écriture ce (lui n’est pas dans l’Ecriture. El en second lieu, ce qui est dans l’Kciituic au sujet du Christ, ils l’Interprètent faussement en vue de leur opinion.

— Je vois maintenant que le Christ n’a pas la nature divine mais qu’il est par sa nature un homme véritable. Montrezmoi maintenant comment la connaissance de cette vérité est nécessaiie au salut.

— Je te montre aussi cela, car de la connaissance dece fait que le Christ est un homme véritable, découle une assurance forte et totale do notre espérance de la béatitude, laquelle serait au contraire affaiblie et même complètement détruite par la conception opposée.

— Comment prouve-t-on cela ?

— Ainsi : de l’opinion opposée il suit que le Christ n’est aucunement un vrai homme, puisqu’ils ne lui reconnaissent pas une personnalité humaine, sans laquelle il ne peut y avoir d’homme véritable. Or, si le Christ n'était pas un homme véritable, il ne pouvait pas vraiment mourir, ni être véritablement ressuscité des morts. Et, de la sorte, notre espérance qui repose sur la résurrection du Seigneur comme sur son fondement se trouve affaiblie et même totalement détruite. A l’opposé, la conception qui reconnaît que le Christ-Jésus est un homme véritable, qui, depuis qu’il a été au monde, a été obéissant à son Père jusqu'à la mort et qui est mort, que Dieu a ressuscité des morts et à qui il a donné l’immortalité, confirme notre espérance de la béatitude au delà de toute mesure et nous représente vivement aux regards que nous aussi nous devons marcher sur ses traces, bien que nous soyons mortels et que nous mourions, car nous ressusciterons avec lui des morts et l’immortalité nous sera aussi communiquée.

Notons que le Christ, selon les sociniens, est appelé Verbe, par saint Jean, parce que Dieu a fait de lui sa « Parole », c’est-à-dire la « révélation de sa volonté envers les autres hommes. Mais ce « Verbe » est bien un homme comme nous. Le Verbe était chair dit saint Jean et non pas : le Verbe est devenu chair. Le mot èyfvETO, dans saint Jean (i, 14), n’a pas le sens de « devenir » mais d'être. Toutefois, depuis son Ascension, ce Verbe créé siège à la droite de Dieu et participe à sa puissance. C’est pourquoi, Socin soutenait qu’on doit l’adorer.

Sotériologie.

Et maintenant comment le Christ

nous a-t-il sauvés ? Uniquement par sa prédication et ses préceptes, en d’autres termes par son ministère de prophète et de roi. Il a enseigné ce qu’il tenait de la révélation divine. Il a remplacé les rites anciens par le rite nouveau de la cène, seul précepte cérémonial du Nouveau Testament.

Pourtant, dans l'édition du catéchisme de 1684 et les suivantes, il est dit, ce que l’on pouvait soupçonner déjà, que les rites établis par le Christ sont au nombre de deux : le baptême et la cène. Ces deux rites n’ont qu’une valeur de symboles. Le baptême doit être donné par immersion. Il a le même sens au fond que la cène, qui n’est qu’une commémoraison de la mort du Christ, comme dans le zwinglianisme. De même le baptême n’est qu’une cérémonie d’agrégation à l'Église chrétienne. Ni la cène ni le baptême ne devraient être appelés des sacrements. Le baptême des enfants est une erreur. Il n’est pourtant pas un péché et on peut le garder à titre de tradition primitive.

L’action rédemptrice du Christ ne s’est exercée que par l’exemple et par les promesses qu’il nous a faites : comme il est mort, nous mourrons. Comme il est ressuscité, nous serons ressuscites également. L’immortalité n’est pas due à la nature humaine. Elle est un don divin. La vie éternelle lut Inconnue de l’Ancien Testament. Les personnes pieuses de l’Ancien Testament n’eurent qu’un vague espoir de bonheur éternel, sans aucune promesse. Les chrétiens au contraire ont une promesse d’immortalité à l’instar du Christ. Les nonchrétiens ne peuvent participer à cette promesse. Ils sont donc voués à l’anéantissement, avec les démons. Ce sera leur damnation éternelle.

Bien que les sociniens parlent du Saint-Esprit comme d’une activité de Dieu en nous — nullement une personne divine — ils n’admettent pas la nécessité de la grâce intérieure. Il n’y a de grâce qu’exté-