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Sl’l RITISME — SPIRITUELS


du magnétisme en tant qu’il viserait un objet non naturel, non honnête, qu’il emploierait îles moyens en soi Illicites ; condamnation île divers livres propageant avec obstination ces sortes d’erreurs, réponse plus générale du 28 juillet 1847 ; le Saint Office y déclare que i si l’on prend soin d'écarter toute adhésion à une doctrine erronée, tout sortilège, tout recours explicite ou implicite au démon, l’usage du magnétisme entendu comme l’emploi de certains procédés physiques, par ailleurs de caractère honnête, n’est pas défendu par la morale, pourvu qu’on ne s’y propose pas une tin illicite ou en quoi que ce soit perverse. Il y aurait manœuvre criminelle et péché d’hérésie à faire appel à des données et à des procédés d’ordre naturel pour obtenir des effets vraiment surnaturels. « Cette réponse, continue le tribunal de la SainteInquisition. Bxait suffisamment ce qu’il y a de permis et ce qu’il y a de défendu dans l’usage ou dans l’abus du magnétisme..Mais la malice humaine s’est accrue. Négligeant les modes naturels d’investigation pour s’attacher à des pratiques anormales, les hommes se vantent d’avoir découvert un mode sur de prédiction et de divination… De là les prestiges du somnambulisme et de la claire-vue. selon l’expression en vogue, prestiges auxquels des femmes sans considération s’abandonnent sous l’action de passes où l’honnêteté n’est pas toujours respectée. En cet état, elles prétendent percevoir l’invisible, et se mêlent témérairement de discourir sur la religion, d'évoquer les âmes des morts, d’en recevoir des réponses, de découvrir des choses inconnues ou éloignées, et de pratiquer d’autres semblables superstitions ; pratiques de divination qui ne vont pas. pour elles et ceux qui les emploient. sans notables profits. En tout cela, quelle que soit la part d’artifice et de prestidigitation, comme on fait appel à des moyens naturels pour obtenir des effets qui ne sont pas d’ordre naturel, il y a manœuvre tout à fait condamnable, entachée d’hérésie, avec scandale contre l’honnêteté des mœurs. » Denz.-Bannw., Enchiridion, n. 1 t>5$1-$2 054 ; cf. réponse du Saint-Office datée du 2 juin 1840, et réponse de li Sacrée Pénitencerie datée du 1."> juillet 1841.

Plus tard, en 1866, les Pères du IIe concile de Baltimore, après avoir dit que nombre de faits merveilleux produits dans les séances de spiritisme doivent être attribués à la fraude, à la crédulité ou à l’art de la prestidigitation, ajoutaient : « Toutefois, on peut à peine mettre en doute que certains faits ne soient dues à l’intervention diabolique, toute autre explication paraissant insuffisante. »

Le 24 avril 1917. le tribunal du Saint-Office rendait une décision d’ensemble. Il avait été demandé : t Est-il permis de prendre part, soit par médium, soit sans médium, en usant ou non de l’hypnotisme, à des entretiens ou à des manifestations spirites, présentant même une apparence honnête ou pieuse, soit qu’on interroge les âmes ou les esprits, soit qu’on écoute les réponses faites, soit qu’on se contente d’observer, alors même qu’on protesterait tacitement ou expressément que l’on ne veut avoir aucune relation avec les esprits mauvais ? » La Sacrée Congrégation du SaintOffice a répondu : Non. sur tous les points. Actaapostolicæ Sedis, 1 er juin 1917, p. 2(58 ; Denzinger-Umberg, n. 2182.

De ces documents, plusieurs parties débordent, nous l’avons noté, la question du spiritisme proprement dit. De plus, on insiste sur les fraudes dont les pratiques en cause sont souvent viciées. Ce qui apparaît manifeste, c’est le jugement porté par l’Eglise contre l'évocation des esprits ou le recours aux âmes des morts, à savoir le fond même du spiritisme. Et selon la doctrine catholique, cette évocation, dans les conditions où procède le spiritisme, est illicite.

Hené Guenon, Le théosophisme, Paris, 1921, in-8° ; L’erreur spirite, Paris, 1923, iii-8° ; Allas Kardec, Le livre des esprits, Paris, is.">7, ln-12 ; du même, L'Évangile selon le spiritisme, Paris ; du même, Le ciel et l’enfer selon le spiritisme, Paris ; Léon Denis, .t/>rés la mort, exposé île la doctrine des esprits, Paris ; (lu même. Christianisme et spiritisme, Paiis ; du même, Preuves expérimentales d" la survivance, Paris, 1910, in-12 ; William Crookes, Recherches sur les phénomènes du spiritualisme (trad.), Paris, s. d., in-12 ; Arthur Conan Doyle, The history <i/ spiritualism, London, 1920 ; Herbert Thurston, S..1., The foundersof the modem spiritualism, dansTAe Month, fevr. 1920 ; du même, A new history o/ spiritualism, ibid., juil. 1920 ; Lucien ltouro, Le merveilleux spirile, 5e édit., Paris, 1922, in-12 ; du même. Le spiritisme d’aujourd’hui et d’hier, Paris, 1923, in-12 ; Th. Flournoy, Esprits et médiums, Genève, 1911, in-8° ; A. Matignon, Les morts et les vivants, Paris, 1801, in-S" ; Th. Mainage, La religion spirite, Paris, 1921, in-12 ; C.-M. de Heredia, Spiritualism and common sensé, New-York, 1922, in-12 ; Charles Hichet, Traité de métapsychique, 2e édit., Paris, 1923, ln-8° ; Paul Yulliaud.Les Rose-Croix lyonnais au XVI IIe siècle, Paris, 1929, in-8° ; Emile Dermenghem, Les sommeils, Paris, 1926, in-8° ; Lucien Koure, L’occultisme et la franc-maçonnerie, dans Études, 5 juin 1930 ; A. Gatterer, Der wissenschaftliche Occultismus, Inspruck, iii-8°.

L. Rouue.

    1. SPIRITUELS##


SPIRITUELS. — Sous le nom de spirituels on entend communément un parti ou plutôt différents groupes de frères mineurs, indépendants les uns des autres, en Italie et dans le midi de la France, qui, mécontents du développement pris par l’ordre de Saint-François, s'étaient formés dans la deuxième moitié du xiiie siècle et se maintinrent jusque vers 1318. Poussés par un zèle plus idéal que discret, les spirituels auraient voulu ramener l’ordre à sa manière primitive de vivre et, se voyant dans l’impossibilité de réaliser ce rêve, ils cherchèrent à se séparer de l’ordre pour vivre strictement selon la règle et le testament du saint fondateur. En cela ils rencontrèrent naturellement une rude opposition de la part du gros de l’ordre qu’on est convenu d’appeler la « Communauté », qui défendait sa position et la légitimité de ses observances, et attaquait les points faibles des adversaires : l’insubordination à l’autorité constituée et le joachimisme qui s'était infiltré dans les rangs des spirituels. La lutte, très inégale dès le commencement, se termina par la défaite complète des spirituels qui furent entraînés dans le schisme et dans l’hérésie ; quelques-uns même finirent sur le bûcher.

En étudiant ici le mouvement et les vicissitudes douloureuses des spirituels, nous condenserons la matière sous les rubriques suivantes : I. Origine et signification du nom de spirituels. IL Motifs et circonstances qui ont engendré le mouvement des spirituels et les traces de celui-ci dans l’histoire franciscaine jusqu’au IIe concile de Lyon (col. 2525). III. Les trois groupes des spirituels proprement dits, à savoir : de la Marche d’Ancône, du midi de la France, de la Toscane, et leur condamnation en 1317-1318 (col. 2527). 1Y. Jugement à porter sur les spirituels et examen de quelques aspects particuliers de leur doctrine et leur littérature (col. 25 12). Y. Rayonnement du mouvement des spirituels en dehors de l’ordre franciscain (col. 2545).

1. Or. ici m : et signification du nom de spiiutuels. — 1° Origine. — L’origine du nom de spirituels donné aux zélateurs franciscains n’est pas certaine. Étymologiquement la signification n’est guère douteuse : homo spiritualis, ou homme spirituel, au.Moyen Age, désignait un homme de profonds sentiments religieux, voué a la vie intérieure et surnaturelle. Dans ce sens général on le trouve chez saint Paul, I Cor., II, 14-15 ; (al., vi, 1, et chez les auteurs du xiii c siècle, comme Thomas de Cclano, Vila II, ii, 69 ; Saint Bonaventure, lu Luc, xxi, 28, Op. mu., éd. Ouai ai chi, t. vii, p. 536 ; Salimbene, Cronicu, éd. Holder-Egger, p. 220,