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SUISSE

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aujourd’hui eu plein développement. Université d’Etat, dont les grades SOnt reconnus par les autres

universités de Suisse et de l'étranger, elle a été fondée en 1889 par le grand homme d'État Georges Python,

qui a réalisé ce miracle dans un canton essentiellement agricole, dépourvu par conséquent de grandes fortunes, de créer, avec les seules ressources du pays qui ne compte pas 150 i" 11 ' habitants, cette école de hautes études, réalisant ainsi un rêve que les catholiques suisses caressaient depuis le XVIe siècle.

L’université de Fribourg comprend quatre facultés : celles de droit, des sciences, de philosophie et lettres. de théologie, lue cinquième faculté, celle de médecine, est en voie de réalisation progressive. L’ensei gnement de la philosophie et de la théologie a été confié aux dominicains, dont le savoir est justement renommé et fait accourir à Fribourg, par centaines, des étudiants de tous pays et même de tous les continents. Car l’université catholique est en même temps internationale : ses professeurs, nommés et rétribués par l'État de Fribourg, appartiennent à peu près à tous les pays de l’Europe : France, Allemagne, Italie, aux pays anglo-saxons et même slaves. La pittoresque ville de Fribourg, qui ne compte guère plus de 'J"> 000 habitants, est ainsi devenue comme un phare lumineux d’où rayonne au loin, par le monde entier, la pensée catholique. C’est à Fribourg aussi que les professeurs et les élèves, de race et de langue diverses, travaillent et collaborent dans un même sentiment de foi et de charité chrétienne. Malgré certaines divergences de vues et certains frottements inévitables, la bonne entente ne cesse de régner entre eux. Bel exemple de ce que pourrait être le monde s’il avait le même idéal chrétien, fait de justice et de charité dans les relations internationales ! Les catholiques suisses sont justement fiers de leur université, qui s’affirme de plus en plus comme un centre intellectuel de premier ordre, et qui peut rivaliser avec les universités protestantes de Berne, Bàlc, Zurich, Genève, Lausanne et Neuchàtel.

IV. Littérature catholique.

Les Suisses sont axant tout positifs et pratiques ; ils n’ont jamais eu un penchant bien prononcé pour les hautes spéculations philosophiques et théologiques. L'étroitesse de leur territoire, la diversité de leur culture, leur isolement au milieu des montagnes, l’absence de hautes écoles, et surtout les difficultés de la vie matérielle dans un pays en grande partie montagneux, pauvre, rude et sauvage, tout devait contribuer à faire de la Suisse, au point de vue intellectuel et artistique, un pays tributaire de ses grands voisins. Au Moyen-Age, alors que la France, l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne et même les pays du Nord avaient des universités celé bres qui attiraient îles centaines et des milliers d'étudiants, les contrées qui forment aujourd’hui la Suisse restèrent un peu étrangères a ces grands mouvements de la peusée et de l’opinion, qui préparaient la Renaissance et les temps modernes.

La Suisse n’avait pas encore d’université. La pie mière, celle de Bâle, ne fui érigée qu’en 1459, en vertu d’un privilège accordé parle pape Pie [I, l’humaniste .l'.neas Silvius l’iccolomini, de Sienne, qui avait pris une part importante au concile de Bâle. La jeune uni versité brilla surtout par ses humanistes, dont le plus célèbre lui Érasme de Rotterdam. Quand la ville de

Bàle passa à la Réforme, les catholiques perdirent le

seul établissement d’enseignement supérieur qu’ils

possédaient. Ils n’avaient pas « le théologiens mai' quant S. Lois des laineux colloques religieux île Batlen, de Berne et de Lausanne, ils eu étaient réduits, pour défendre leur loi et réfuter les novateurs, à faire

appel : i des théologiens étrangers.

Pendant le demi siècle qui suivit l'établissement de

la Réforme, les catholiques suisses n’eurent ni le temps ni les moyens de faire de hautes études et de se livrer à la théologie spéculative : ils avaient à se défendre contre ceux qui voulaient les protestantiser de force. Le concile de Trente donna heureusement le signal d’une véritable restauration religieuse et intellectuelle, grâce en particulier à la création des collèges de Lucerne et de Fribourg, dont l’organisation fut courue aux jésuites, grâce aussi à la fondation du Collège helvétique de Milan par saint Charles Borromée, séminaire qui devait être longtemps une maison providentielle pour la formation du clergé suisse. Si elle n'était pas suffisamment connue, ce serait le cas de retracer ici l’activité admirable de saint Lierre Canisius au point de vue théologique, apologétique, catéehistique, hagiographique. Ce serait aussi le cas de parler de son contemporain, saint François de Sales, évêque de Genève, dont l’apostolat eut en Suisse un heureux contre-coup et dont certains ouvrages, tels que V Introduction à la vie dévote, le Traité de l’amour de Dieu, les Controverses, ont eu sur la pensée et la vie religieuse des catholiques suisses, en Suisse romande tout au moins, une Influence considérable. Les protestants axaient devancé les catholiques par la création de leurs académies, véritables pépinières de théologiens et de prédicants que Calvin, par exemple, envoyait par toute l’Europe. Mais, de l’aveu d’historiens protestants, on chercherait vainement parmi ces théologiens, liges dans leurs formules et leur intellectualisme droit, des hommes capables de contrebalancer l’influence d’un Lierre Canisius et d’un François de Sales.

Les étudiants faisaient de sérieuses études littéraires dans les collèges des jésuites de Lucerne, Fribourg, Porrentruy, Soleure, Brigue. Ceux qui se destinaient à l'état ecclésiastique allaient étudier la théologie au collège Borromée de Milan, au Collège germanique de Rome, dans les universités allemandes, surtout à Fribourg-en-Brisgau. à Dillingen, à lngolstadt, d’où ils revenaient souvent avec le titre de docteur. Les facultés de théologie que les jésuites ouvrirent à Lucerne, en 1660, et plus tard au collège Saint-Michel de Fribourg, remirent en honneur les études sacrées. On pourrait citer ici les noms, bien oubliés aujourd’hui, de théologiens et d'écrivains remarquables qui sont sortis de ces écoles, tel ce Georges Gobât, du pavs de Porrentruy, dont les traités de inorale étaient universellement appréciés.

Si, au XVIII 6 siècle surtout, les doctrines gallicanes, jansénistes et tébroniennes eurent aussi leurs partisans et leurs défenseurs en Suisse, la grande majorité du clergé el des laïques resta tidèle aux directions du Saint-Siège et à l’orthodoxie traditionnelle. Le mérite en revint en partie à des théologiens et à des hommes d'Église remarquables, tels que le prévôt de Bero munster, Goldlin de Tiefenau, aux professeurs de théologie Geiger, Widmer, Gûgler, etc. Par leur enseignement et leurs écrits (voir Werner, Histoire (le la théologie catholique, Munich. 1866), ils ont résolument oriente la pensée catholique vers une forte et saine théologie, donné à des centaines de jeunes lévites le goût et l’intelligence de la haute théologie du Moyenvge ; ils ont aussi détendu courageusement l'Église contre l’influence délétère et antiromaine de Wessenberg, le vicaire général du diocèse de Constance. Gei

l ; c|' surtout, qui était professeur de théologie à Lu eeiiie. a exerce une grande Influence sur les catholiques et même sur les protestants de son temps. Liions aussi Conrad Tanner, abbé d’Finsicdchi, mort en 1825, qui laissa une série d’ouvrages pédagogiques, religieux et ascétiques, et qui fui un des bons artisans de la régénération de la vie catholique en Suisse.

La création des séminaires diocésains où les futurs