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SYRIENNE (ÉGLISE). DOGMATIQUE

tes de l’Écriture sainte et défendre la foi chrétienne, Trinité et incarnation. Il défendit les jacobites contre ceux qui les accusent de théopaschitisme. Il écrivit à Joseph Abou Hakim pour lui expliquer, entre autres, la preuve de l’existence du Christ dans ce monde, les motifs pour lesquels Dieu a créé le monde, la rémission des péchés par le Christ, l’existence des anges, l’unité et la trinité de Dieu, l’immortalité de l’âme humaine, l’eucharistie et le sens de la parole du Christ : « Je suis le pain descendu du ciel. » Il composa un traité pour expliquer l’union hypostatique. Cf. Maï, Script, vet. nova collectio, Rome, 1831, t. iv, p. 260 sq. ; M. Jugie, Theologia dogmatica christianorum orient., Paris, 1935, t. v, p. 468 sq.

Parmi les écrivains des xie et xiie siècles, il faut signaler : Jésu bar Schouchan, patriarche jacobite sous le nom de Jean X († 1073). Outre les canons ecclésiastiques, il écrivit un traité sur le pain eucharistique et sur le ferment, le sel et l’huile qui y sont ajoutés par les jacobites, et quelques lettres dont quelques-unes en arabe. On lui attribue deux liturgies. Abou Raita Habib ben Quadma, évêque de Zagrit, composa en arabe certains traités sur la Trinité et l’incarnation et sur le Trisagion. Denys ou Jacques Bar Salibi († 1171) a été étudié ici, t. viii, col. 283-286 ; de même l’historien Michel le Grand ou le Syrien, patriarche d’Antioche († 1199), t. x, col. 1711-1719.

Avec le xiiie siècle prend fin la littérature syriaque et la littérature jacobite. Deux écrivains émergent. Jacques Bar Schakako († 1241), qui prit le nom de Sévère en devenant évêque du couvent de Mar Mattaï où il était d’abord moine avant d’être élevé au siège de Zagrit. Outre son livre des dialogues sur la grammaire et la logique, il composa un long traité, véritable somme théologique intitulé le Livre des trésors : il y traite de la Trinité, de l’incarnation, de la providence, de la création, des sacrements, des anges, de l’âme, de la résurrection des morts et du jugement et donne une profession de foi trinitaire et christologique. Pour clore la liste, on ne peut mieux faire que de citer Grégoire Aboul Farage, surnommé Barhebræus (1226-1286) la gloire de l’Église syrienne jacobite ; voir t. ii, col. 401-406.

Pour la scolastique dans l’Église syrienne jacobite, voir art. Scolastique, t. xiv, col. 1714-1715.

VII. La dogmatique de l’Église jacobite. — La foi de l’Église syrienne jacobite n’a pas été également exposée par tous ses théologiens. Signalons que quelques-uns parmi eux ont été amenés, à cause de leur formation philosophique, à donner un exposé clair et méthodique des preuves de leur foi, surtout pour les deux dogmes de la Trinité et de l’incarnation. On peut les appeler les scolastiques de l’Église jacobite ; citons entre autres : Philoxène de Mabboug, ici, t.xii, col. 1517 sq. ; Yahia Ben Adi († 974), Jacques Denys Bar Salibi († 1171), Jacques Bar Shakako († 1241) et Barhebrœus († 1286). Nous allons essayer d’exposer rapidement les principales questions théologiques communément admises par ces maîtres de l’Église jacobite.

1° Le dogme trinilaire est professé tel qu’il a été exposé et défini par les trois premiers conciles œcuméniques et les Pères des Églises occidentale et orientale avant le schisme de l’Église syrienne. Surtout à partir du xe siècle, les écrivains jacobites ont mis leur science philosophique au service de la théologie.

Pour la théologie sur le Saint-Esprit, voir dans ce dictionnaire ce qui a été donné des témoignages des premiers Pères des Églises syriaques, art. Esprit-Saint, t. v, col. 743-744, sur sa divinité et sa personne, col. 756 ; voir également Lamy, S. Ephrœmi syri hymni et sermones, Malincs, 1889, t. ii, col. 353356, et t. iii, col. 241-244. Pour la procession du Saint-Esprit, question si débattue dans les Églises d’Orient,

voir Revue des Églises d’Orient, t. iv, 1888, p. 177-179. Nous allons prouver rapidement que l’Église syriaque croit à la double procession du Saint-Esprit.

Il faut savoir d’abord que les théologiens jacobites ont en grande vénération les premiers Pères de l’Église orientale et ceux d’Occident tels que Didyme, Athanase, Cyrille, Basile, Grégoire de Néocésarée, Grégoire de Nazianze et Grégoire de Nysse. De plus ils les citent dans leurs écrits. Pour ne parler que de Barhebræus, une bonne partie des textes patristiques dans son Nomocanon et dans son Candélabre des sanctuaires est empruntée à ces Pères. Les jacobites auraient dû admettre la doctrine de ces Pères sur la procession du Saint-Esprit a Pâtre per Filium. Dans ce dernier ouvrage parlant des latins, Barhebræus dit qu’ils se distinguent des autres par leur affirmation que le Saint-Esprit procède a Pâtre Filioque. Base IV, c. v, ms. de Beyrouth 570, p. 362.

En se référant aux écrivains jacobites on trouve beaucoup d’entre eux qui disent que le Saint-Esprit procède du Père, comme l’ont affirmé l’Évangile et le symbole de foi de Nicée sans exclure sa procession du Fils. A remarquer aussi leurs affirmations que le Saint-Esprit procedit a Pâtre et a Filio accipit, selon l’Évangile de saint Jean, xvi, 13-15. Cette expression qui prouve la procession du Saint-Esprit du Fils comme du Père se trouve dans Philoxène de Mabboug, De Trinitate, éd. et trad., Vaschalde, p. 26, 174 ; dans-Sévère d’Antioche, homélie xc, P. O., t. xxiii, p. 145 (éd. et trad. Brière) ; dans Jacques de Saroug, lettre à l’abbé Samuel, cf. Abbellos : De vita et scriptis S. Jacobi…, Louvain, 1867, p. 121 ; Barhebrœus, dans son ouvrage, Le candélabre des sanctuaires, base III, c. ix, ms. cité, dit que tout ce qui est au Père est également au Fils et au Saint-Esprit, excepté la paternité, tout ce qui est au Fils est au Père et à l’Esprit-Saint, excepté la filiation et tout ce qui est au Saint-Esprit est au Père et au Fils, excepté la spiration… Le Saint-Esprit procède du Père et reçoit du Fils tout ce qui est en lui, p. 206. Cette même expression se trouve également dans plusieurs anaphores syriaques à l’usage des jacobites, telles les anaphores de saint Clément, de Maroutha, de saint Xyste, de Matthieu le Pasteur, de Dioscore, de Denys Bar Salibi ; cf. Renaudot, Liturgiarum orienlalium collectio. t. ii, p. 136, 191, 263, 348, 449, 494, 529, et S. Salaville, dans Slavorum litteræ theologicæ, t. v, 1909, p. 165-172. Assémani donne cette citation du patriarche Denys III (959-961) : Pater a nullo habet existenliam, sed per seipsum existil ingenitus ; Filius est genitus a Pâtre ab œterno, Spiritus Sanctus promanat ex Pâtre et Filio ; cf. Bibl. orient., t. ii, p. 131 et Disserlatio de monophysitis, p. 15. Pour les textes canoniques, voir les citations données par M. Jugie, Theologia dogmatica cliristianorum orienlalium, Paris, 1935, t. v, p. 608 sq.

La christologie.

C’est le dogme qui a occasionné

la séparation de l’Église jacobite de Syrie de l’Église catholique. Ces jacobites, on les appelle monophysites parce qu’ils se sont mis en lutte ouverte avec le concile de Chalcédoinc et du pape saint Léon ; mais ils ne sont pas pour cela cutychiens, voir ici-même art. Eutychès et I’.utyciiianisme, t. v, col. 1585-1609. Sont-ils réellement monophysites dans le sens plein du mot ? Les savants et les érudits tels qu’Assémani, Renaudot, Richard Simon et Nau ont reconnu, après avoir étudié longuement les théologiens de cette Église, qu’ils admettent un Christ parfait : Dieu parfait et homme parfait, sans confusion et sans mélange. A cette question : « dans quelle mesure les jacobites sont-ils monophysites ? », Nau répond qu’il préfère les appeler diplophysites, c’est-à-dire partisans de la nature double. Hev. Or. chrét., t. x, 1905, p. 131 sq. Voir la pensée de ces érudits, art. Monophysisme, t. x,