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3147 SYRO-MALABARE (ÉGLISE). GROUPE S YRO-M AL AN K ARE 3148

bar en 1875. Mais la majorité des prêtres et des fidèles tenait pour Mar Athanase Matthieu, ainsi d’ailleurs que la hiérarchie de l’Église d’Angleterre. Bien que l’excommunication portée par lui contre Mar Athanase Matthieu ait provoqué contre ce dernier une sentence de la cour royale du Travancore, le schisme continua. Placide de Saint-Joseph, op. cit., p. 28 sq.

Mar Athanase Matthieu avait fortement orienté ses adhérents vers le protestantisme, car il avait introduit l’usage de célébrer la liturgie en malayalam, supprimé les prières à la sainte Vierge et pour les morts, omis tout ce qui pouvait favoriser la croyance à la transsubstantiation et au purgatoire. Aussi, lorsqu’ils voulurent se distinguer, devant les autorités, des jacobites traditionnels ou puthankuttukar, les partisans de Mar Athanase Matthieu étaient fondés à choisir le nom de « réformés », naveekarannakar. Quelques « syriens » allèrent plus loin encore dans la voie de la réforme, leur groupe appartient aujourd’hui au diocèse anglican de Travancore et Cochin, créé en 1879. E. Chatterton, A hislo’ry of the Church of England in India, Londres, 1924, p. 269-281.

Le patriarche jacobite voulut profiter de son long séjour aux Indes pour rendre plus étroit le contrôle de son autorité et, voyant que les autorités tenaient en grand compte ses décisions, il eut soin de se procurer des garanties légales. C’est ainsi qu’au synode de Mulanthuruth, tenu en 1876, il fit prescrire que chaque communauté paroissiale souscrirait une promesse d’obéissance absolue aux ordres venus d’Antioche et la ferait légaliser. Le document original devait être conservé dans le coffre-fort de l’église paroissiale, et une copie authentique envoyée au patriarcat. Placide de Saint-Joseph, op. cit., p. 28 sq. Le but de ce renforcement de l’autorité suprême était double : empêcher toute discussion relative à la légitimité des évêques, établir une base solide pour la fiscalité patriarcale. En marge des promesses d’obéissance il y avait des dispositions pour la collecte du cathedraticum.

Mais on risque souvent gros à vouloir trop bien faire. Après avoir usé de son autorité spirituelle en répartissant la communauté jacobite entre sept éparchies et consacré lui-même six métropolites au milieu desquels Mar Dionysios Joseph ne fut qu’un primus inter pares, cf. G.-M. Ræ The syrian Church in India, p. 304-326, le patriarche voulut s’assurer le contrôle de tous les biens. Lorsque Mar Athanase Matthieu mourut en 1877, remplacé comme archevêque et commissaire à l’administration des biens de la communauté jacobite par son neveu Mar Thomas, un procès s’engagea entre les « réformés » ou marthomistes et les partisans du patriarche. Ce procès dura de 1879 à 1889 devant les trois ordres successifs de la magistrature du Travancore. G.-M. Ræ op. cit., p. 327-352 et 380-382 ; plusieurs textes juridiques relatifs à cette controverse dans Placide de Saint-Joseph, op. cit., p. 30-34.

Pendant plusieurs années, la partie de la communauté jacobite qui était restée fidèle au patriarche vécut en paix ; mais, lorsque le gouvernement turc eut, en 1906, prononcé la déposition du patriarche Abdu’l-Masîh, son successeur Ignace Abdallah Sattouf, visitant les Indes en 1909, entra en conflit avec le métropolite Mar Georges Dionysios V. Le nouveau patriarche fut sans doute reçu par tous avec les honneurs dus à sa dignité, mais le métropolite lui refusa de procéder à l’inspection de l’administrai ion financière. Le palriarche l’excommunia et consacra un nouveau métropolite sous le nom de Mar Cyrille ; sur quoi la chrétienté se divisa en deux parts à peu près égales, parti du patriarche et parti du métropolitain ou Metran party. Mar Dionysios eut alors l’idée de recourir à l’ancien patriarche Abdu’I-Masîh, qui, n’ayant jamais

accepté la sentence de déposition portée par le sultan, était fondé à prétendre qu’elle ne pouvait lui enlever sa juridiction sur les Indes. En 1912, Mar Ignace Abdu’I-Masîh se rendit aux Indes, où sa présence contribua à consolider le nouveau parti. Les membres des deux partis, qui avaient défini leurs positions au cours de 1910, dans deux synodes tenus en Alwaye pour les patriarchistes, à Kottayam pour le Metran party, sont organisés comme suit : 140 000 partisans du patriarche, avec cinq évêques, dont un étranger, délégué du patriarche, qui correspond avec lui et lui envoie le cathedraticum ; 150 000 adhérents du métropolite, décoré par Abdu’I-Masîh du titre de catholicos, avec trois évêques suflragants. J.-C. Panjikaran, Christianity in Malabar, p. 122-126. Plusieurs textes relatifs à l’organisation des deux partis dans Placide de Saint-Joseph, op. cit., p. 34-40.

La lutte qui se poursuivit pendant dix ans entre les « syriens réformés » et les jacobites restés fidèles au patriarche avait inspiré à plusieurs la nostalgie de l’unité catholique et, en 1888, Mar Dionysios V était entré en pourparlers avec le délégué apostolique en vue d’une réunion en bloc de toute son Église. Si ses hésitations se prolongèrent au point qu’on n’arriva jamais à une conclusion, la division qui se produisit en 1912 eut un effet plus profond. Car, ayant cessé de dépendre du patriarche d’Antioche, les membres les plus intelligents et les plus pieux du Metran party comprirent bientôt qu’ils ne pouvaient prétendre occuper dans l’Église une position traditionnelle sans être sous la dépendance d’un patriarcat. A défaut d’Antioche, ils ne pouvaient penser qu’à Rome. Le patriarche Abdu’I-Masîh, d’ailleurs, à son retour des Indes, avait abjuré le monophysisme (3 mai 1913). Pendant les quelques mois qu’il vécut avant de mourir, le 6 mars 1914, il s’entretint plusieurs fois avec le patriarche syrien catholique, Ignace Éphrem II Rahmani, des chrétientés qu’il avait visitées, si bien que celui-ci chercha à entrer en relations avec leur hiérarchie, leur offrant des exemplaires des livres liturgiques, dont il avait corrigé le texte d’après les manuscrits. Déjà Mar Dionysios V s’était vanté d’employer pour son usage personnel le missel syrien que l’imprimerie de la Propagande avait publié en 1843 ; les belles impressions de Charfé ne pouvaient qu’être reçues favorablement. En 1925, les relations étaient suffisantes pour que le patriarche Rahmani ait pu adresser au métropolite une invitation directe à l’union. Si cette communication ne reçut pas immédiatement une réponse favorable, elle n’en fut pas moins discutée dans les assemblées des évêques. D’autres considérations entrèrent encore en ligne de compte. Le pieux et cultivé évêque de Béthanie, Mar Ivanios (Georges Thomas Panikervirtis), avait lu dans des revues anglaises des comptes rendus des conversations de Malines et l’organisation par Pie XI, en 1923, de la hiérarchie syro-malabare était la preuve tangible de la sollicitude du Saint-Siège pour les chrétientés des rits orientaux. Quelques années auparavant, soucieux de développer la ferveur chez ses coreligionnaires, il avait fondé à Calcutta un ordre monastique sous la protection de saint Basile, de saint Benoît et de saint François d’Assise, ainsi qu’une congrégation féminine, initiée à la vie religieuse par des sœurs anglicanes et destinées à participer au travail apostolique des moines. Ce sont les membres de ces deux institutions, ramenées au Malabar en 1919, qui avaient permis à Mar Ivanios de créer dans cinq des sept éparchies jacobites (Kottayam, Kandanad, Angamalé, Niranam, Quilon, Thumpanom, Cochin) des centres modèles de vie chrétienne, que le synode du Metran party lui avait permis d’administrer à la façon de paroisses, avec exclusion de l’ingérence des laïcs, lorsqu’il avait été consacré, en mai 1925, avec le