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TALMUD. ORIGINE


celle de son maître qu’il reproduit sans le nommer, elle y ajoute des halakhot provenant d’autres collections, même quand elles étaient rejetées par son maître.

Juda le Prince (appelé par antonomase Rabbi) entreprit vers la fin du 11e siècle une nouvelle collection de halakhot : il semble avoir eu pour objectif à la fois de fixer la tradition et de recueillir les sentences transmises dans les diverses écoles : fins en apparence contradictoires qui expliquent les incohérences de sa compilation. Elle a pour base première le recueil de Meïr et celui d’Aquiba, fondus ensemble assez mécaniquement, comme le montre la critique, interne : répétitions, clauses indispensables omises, formes différentes pour le même précepte, contradictions, deux réponses à la même question, incohérences dans le même traité, surtout différences de langue montrant l’emploi de deux vocabulaires, variantes dans les expressions et les références… Conclusions de Chanoch Albeck, Unlersuchungen ûber die Redaktion der Mischna, Berlin, 1936. Ces défauts furent encore aggravés par les additions que subit le travail du patriarche : plusieurs de ses disciples, faisant un recueil plus large de michnayot, les incorporèrent au travail de leur maître après sa mort (ce qui explique les références à Rabbi) ; on le compléta aussi par des emprunts faits à la Tosephta.

Ces faits montrent que Rabbi prétendait, non produire un code faisant autorité, mais simplement un instrument scolaire. En réalité le crédit dont jouissait le patriarche, les avantages de son recueil ont valu à ce dernier de devenir la Michna par excellence, supplantant toutes les autres, le texte qu’on étudiera dans les écoles, qu’on invoquera à côté des Écri’ures et presque sur le même rang.

Nous donnerons plus loin le sommaire de la Michna : on est étonné de voir tel traité figurer dans la section à laquelle il appartient : ainsi le traité des Bénédictions dans la section des Semences, ceux des Naziréens et des Vœux dans la section des Femmes. Dans le corps de chaque traité l’ordre n’est pas toujours aussi méthodique que l’attendrait notre logique : sentences jointes matériellement, blocs extraits tels quels de compilations antérieures, successions appelées par des préoccupations casuistiques. Certaines sentences et des groupes de sentences comportent des références icripturaires (environ (>GGi, se rattachant ainsi au genre midrach ; dans l’ensemble c’est plutôt la forme fwlakha. Les noms des autorités rabbiniques dont proviennent telles décisions sont parfois mentionnés : ordinairement, quand elles sont contestées ou s’opposent a la loi traditionnelle, rapportées sans aucune référence personnelle.

I.a forme ordinaire est sèche et précise comme il convient dans un code juridique : rares sont les narrations, les histoires et les explications. Même dans le seul traité contenant des maximes morales et édifiantes f Pirqé Aboi), la brièveté est de règle. La langue est un hébreu assez pur, mais différant notablement de l’hébreu biblique le plus récent, langue artificielle,

partie peut être uniquement dans les éeoles rabbiniques. mais se rattachant authentiquement à l’hébreu

biblique. Le vocabulaire, en plus du vieux fonds (las sique, contient des mots importés de l’aramécn, ainsi que nombre de mots grecs et latins ; la syntaxe est

impie, peut-être par la contagion de l’araméen, plus probablement en raison de la préoccupation des docteurs de créer un style Juridique, clair et technique. Cf. M. II. Segal, A Grammarof Mishnaic Hebrew, < »

forrl. 1927.

is pouvons distinguer trois recensions de la Michna : relie que produisent les manuscrits contenant les michnayot, cille qui est a la base fin Talmud

de Jérusalem, et celle qui est à la base du Talmud de deux dernières Incorporant plus ou

moins les additions et modifications pratiquées par les rabbins palestiniens ou babyloniens.

Les Talmuds.

Cependant les écoles rabbiniques

ne cessaient de se multiplier et d’accroître leurs travaux, soit en Palestine, soit surtout en Babylonie, où le judaïsme jouissait d’une grande prospérité. Les docteurs qui succédèrent aux tannaim s’appellent les amoras, ou amoraim, ceux qui se contentent de transmettre, de réciter, de prononcer, non sans les commenter, les traditions reçues ; vers la fin du ve siècle, en Babylonie, leur succèdent les saboraim, ceux qui réfléchissent et examinent, ainsi nommés parce qu’ils prenaient pour objet de leur enseignement la doctrine proposée par les amoras.

Dans les écoles quatre sujets d’étude : l’écriture ou migra, le texte sacré étudié en lui-même et dans les exégèses traditionnelles, dans les commentaires (midrachim) tannaïtes ; la michna, qui prend la place de la halakha, qu’elle présente sous une forme consacrée ; la haggada, qui comprend tout ce qui n’est pas halakha. c’est-à-dire la morale, l’histoire, la piété, l’édification, voire les sciences profanes, médecine, astrologie, magie, en bref de omni re scibili… ; le Talmud, enfin, qu’il est nécessaire de définir exactement. Le mot, d’hébreu posl biblique (de la racine Imd, piquer, exercer, apprendre, enseigner), signifie étude, enseignement, science, tout particulièrement science de la fora : le terme désigne souvent, comme midrach dont il devient synonyme, la confirma ion par une exégèse biblique d’un texte juridique ; il es’, employé aussi pour l’étude directe de la halahka. Et, comme les halakhot étaient codifiées dans la Michna. étudiée tant en Babylonie qu’en Palestine, le Talmud li lit par n’être plus qu’un commentaire de la Michna. D’abord distinct, comme objet d’étude, de la Michna. le Talmud finit par absorber et désigner toutes les branches de la science rabbinique. En Babylonie le mot talmud est souvent suppléé par le mot gemara (gmr, compléter, apprendre), qui prend le sens spécifique de commentaire de la Michna (c’est par ce mot — en abrégé — que dans le liubli sont introduits ces commentaires). En son sens spécifique, Talmud désigne donc un commentaire de la Michna : commentaire large qui comportait des traditions tannaïtes, des exégèses bibliques, des interprétations juridiques, des discussions casuistiques, des notions lexicographiques, en un mot tout ce qu’un maître abondant et peu systématique peut glisser dans ses leçons et tout ce que les dissertations de ses élèves peuvent leur ajouter. On a dit souvent que le Talmud était le procès-verbal des enseignements donnés et des propos échangés dans les écoles

rabbiniques, écoles rabbiniques de Palestine et écoles de Babylonie, les unes et les autres ayant leurs caractérisl Iques propres. Nous avons donc deux Talmuds, le palestinien et le babylonien.

Le. Talmud palestinien était régulièrement dénommé à l’origine : le « Talmud de la terre d’Israël », ou bien « Talmud de l’Occident » ; peu justifiée est la désignation, déjà ancienne, qui a prévalu : « Talmud de Jérusalem », ou plus simplement Jeruialmi. L’autre est appelé Talmud babli. plus simplement lUibli, le Talmud par excellence, parce que le plus long et le plus étudié. Les habitués disent plus rapidement : le

Scluis (abréviation de Scheta siderei, les six sections). Comme la Michna. les Talmuds sont des compila lions, œuvres d’une collectivité. Cependant la tra dit ion, simplificatrice, aurait voulu en faire hommage

à une seule personnalité : tout autre est la réalité.

On a dit souvent que le Talmud palestinien avait pour auteur R, .lolianan b. Nappaha (appelé simplement H..lolianan). le plus célèbre chef de l’école de’fi lier la de, le i loi leur amora palestinien le plus in Huent († 279, âgé de 80 ans). Les références a des rabbins,