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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/137

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CANON DES LIVRES SAINTS
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tion des écrits apostoliques, depuis leur rédaction jusqu’à l’an 220 environ ; la deuxième, de discussion des deutérocanoniques dans certaines Églises, de 220 jusqu’à la fin du ive siècle en Occident et du v c en Orient ; la troisième, de pleine possession, depuis cette dernière époque jusqu’au concile de Trente et jusqu’à nos jours dans l’Église catholique. Comme cette dernière période ne crée pas de difficulté, nous la passerons sous silence, el nous ne traiterons même dans les deux autres que les points principaux.

/ rJ PÉRIODE, DE FORMATION ET CONCENTRATION. —

C’est la période la plus importante, car il est capital de savoir ce que l’Église à son berceau pensait du Nouveau Testament, quels livres apostoliques elle reconnaissait comme divins et comment elle les a réunis en collection canonique. C’est aussi la plus obscure, car nous manquons de renseignements directs et nous sommes réiluils à déterminer l’étendue du recueil néotestamentaire par l’emploi que les anciens écrivains, catholiques ou hérétiques, faisaient des documents apostoliques.

1° De 05 à 130. — Ni les apôtres ni leurs premiers successeurs ne fixèrent expressément le canon du Nouveau Testament. Les livres qui en font partie se supposent réciproquement et se rendent un témoignage mutuel ; mais saint Pierre seul, II Pet., iii, 16, fait allusion à une collection d’Épîtres de saint Paul, qu’il assimile aux autres Écritures. Les Pères apostoliques font des emprunts à la plupart des livres du Nouveau Testament, en citent plus ou moins exactement le texte, et une fois au moins, comme Écriture. Barnabe, Episl., iv. 14, Funk, Paires apostolici, Tuhingue, 1901, t. i, p. 48. Pour la Didachè, voir t. I, col. 1686-1687 ; pour Barnabe, col. 420-421 ; pour les Pères apostoliques en général, t. i, col. 1636-1637, et les tables de Funk, op. lit., t. i, p. 640-652. Si à ces témoignages on joint celui de Basilide, voir col. 466, et de quelques apocryphes du début du IIe siècle, on aboutit aux conclusions suivantes : En l’an 130, le canon évangélique, composé des quatre Évangiles canoniques, est constitué en fait dans toutes les Églises ; il l’a été par une tradition pratique, qui les a séparés des évangiles apocryphes et qui était fondée sans doute sur les circonstances alors connues de leur origine. Les Épitres de saint Paul sont aussi répandues partout et forment une collection qui renfermait au moins treize lettres de cet apôtre. Il n’y avait que ces deux recueils. Les autres (’ci ils apostoliques n’étaient pas groupés. Ils étaient cependant plus ou moins répandus, même l’Epître aux Hébreux qui, à Borne, élait connue comme l’œuvre de saint Paul. Quelques apocryphes avaient cours déjà, ou au moins des traditions orales qui furent plus tard consignées dans les apocryphes. Voir t. i, col. 1637-1638. Enfin des écrits, tels que FÉpître de saint Clément aux Corinthiens, le Pasteur d’Hermas, qui seront plus tard tenus en quelques lieux pour canoniques, jouissaient déjà d’un grand crédit et servaient à l’édification des

fidèles.

2 » Dr 130 à 170. — 1. La concentration des livres du Nouveau Testament se continue. Les Pères apolo3 utilisent les livres du Nouveau Testament et leur lurii île nombreux emprunts. Voir t. r, col. 1596. Les Evangiles sont groupés et saint Justin leur donne explicitement ce nom au pluriel, synonyme de celui de

> moires des apôtres » . Apol., I, (i, /’. a., t. vi,

col. 429 ; cf. E. Preuschen, Die Evangeliencitate Justins, dans Anlilegomena, Gicssen, 1901, p. 21-38, 119-133. Tatien, son disciple, les harmonise dans son Ata -enaap &v. Saint Justin cile expressément l’Apocalypse, Ihni mm Trypfi., 81, /’. (’., t. vi, cul. (17(). Il s’inspire de Épitres de saint Paul et des autres apôtres aussi bien que des Actes. Méliton de S.inles avait composé tur l’Apocalypse un livre perdu. Eusèbc, II. /.’., iv, 26, /’. G., i. xx, col. 392. Les I pitres catholiques ont peu

d’attestation. Cf. J. Delitzsch, De inspiratione Scripturse sacrm quid statuerint Paires apostolici et apologetse secundi ssecidi, Leipzig, 1872. Les hérétiques se servaient des Évangiles canoniques, et Héracléon avait écrit sur celui de saint Jean un commentaire, dont Origène, In Joa., P. G., t. xiv, a reproduit quelques fragments. Les valentiniens connaissaient les Épitres de saint Paul, même celle aux Hébreux, la première de saint Pierre et l’Apocalypse ; ils avaient beaucoup d’apocryphes. Marcion avait un Nouveau Testament, composé de deux parties : tô eùayysXiov, formé du seul Évangile de saint Luc et encore mutilé, et ô âTrôorcO.oç, comprenant dix Épitres de saint Paul parmi les treize qu’il connaissait. Il excluait formellement les Épitres à Tite et à Timothée sous prétexte qu’elles étaient adressées à des particuliers. Tertullien, Adv. Marcion., v, 21, P.L., t. il, col. 524. Sur le Nouveau Testament de Marcion, voir Zahn, Geschichte des Neutestamentlichen Kanons, Erlangen et Leipzig, 1889, t. i, p. 585-718 ; 1891, t. il, p. 409-529. Les hérétiques du IIe siècle ont donc trouvé l’Église en possession des quatre Évangiles et de la collection des Épitres de saint Paul, et ils les ont pris à leur usage. Mais ils y ont joint des apocryphes, qu’ils mettaient sous le patronage des apôtres ou de leurs disciples immédiats. L’Église leur a opposé, non pas un canon ofliciellement fixé de ses Écritures, mais seulement sa tradition.

2. Beuss, Histoire du canon des saintes Écritures, p. 72-76, a prétendu qu’à l’époque de Marcion les Évangiles et les Épitres n’étaient pas encore regardés comme divins et inspirés, ni nettement distingués des apocryphes. Plus tard seulement, l’Église aurait placé les écrits des apôtres à l’égal de ceux des prophètes, afin de les opposer aux nouveaux prophètes des montanistes, et elle aurait opéré le triage des livres apostoliques en vue d’éliminer les apocryphes gnostiques. Ibid., p. 8897. Mais saint Théophile d’Antioche, Ad Aitlol., 1. III, c. XII, P. G., t. vi, col. 1137, n’a pas été le premier à affirmer l’inspiration des évangélistes et des apôtres comme celle des prophètes de l’ancienne alliance. Cf. I. II, c. xxii ; 1. III, c. xiv, col. 1088, 1141. Avant lui, saint Pierre, I Pet., ni, 15, 16, avait comparé les Kpîtres de saint Paul aux autres Écritures. L’auteur de l’Epitre de Barnabe, iv, 14, Funk, t. i, p. 48, avait cité un passage de saint Matthieu avec la formule : <, ’, ; Y£ypa7riai. Saint Clément de Borne, 1 Cor., xi.vn, 3, Funk, t. i, p. 160, dit aux Corinthiens que saint Paul leur a écrit une lettre Tn/sutiatixtôç, sous l’inspiration du Saint-Esprit. Si saint Ignace, Phil., viii, 2 ; ix-Smyrn. , v, 1 ; vii, 2, Funk, t. I, p. 270, 272, 278, 282, parle plutôt de l’Évangile oral et de la prédication apostolique, son témoignage cependant embrasse dans une certaine mesure l’Évangile écrit, qu’il joint à la loi de Moïse et aux prophètes. Le c. xi, 6, de l’Épître à Diognète, Funk, t. i, p. 410, s’il était authentique, prouverait que les Pères apostoliques assimilaient les évangélistes et les apôtres aux prophètes. La // Cor., ii, 4, Funk, t. I, p. 186, cite une parole des Évangiles à la suite de versets d’Isaïe et l’introduit en ces termes : xxl Itepa Se ypacp-ri XÉyet. Saint Justin se sert de la même formule : « il est écrit, » pour amener les citations dis Évangiles et celles de l’Ancien Testament, par exemple, Dial. cum Tryph., 19, P. G., t. vi, col. 584. Il regarde formellement l’Apocalypse comme une révélation divine. Ibid., 81, col. 669. La croyance à l’inspiration des livres du Nouveau Testament a donc précédé l’apparition du montanisme et il reste vrai que II glise n’a

jamais traité les écrits aposloliques connue des livres

profanes et ordinaires.

3. Sans doute, quelques-uns des premiers écrivains ecclésiastiques semblent s’être servis docrits apocryphes, encore qu’un ait beaucoup exagéré cel emploi. Ainsi, la Il Cor., v, 2-4 ; VIII, 5, xii, 2-5, luuk, t. i,