- BÉNÉDICTION##
1. BÉNÉDICTION. - I. Notion. II. Existence du
pouvoir de bénir. III. Espèces. IV. Etlets et mode d’efficacité.
I. Notion.
1° Diverses acceptions du mot.
Dans
le langage biblique et ecclésiastique, la bénédiction, 6erâkâh, vV/ry-ix, benedictio, est prise dans des acceptions différentes. — 1. Adresséeà Dieu, elle a toutes les significations de la prière, l’adoration, la louange, l’action de grâces et l’invocation. I Cor., x, 16 ; Apoc, v, 12, 13 ;
12 ; S. Hilaire, Tract, in Ps. cxxxiii, n. 1, P. L., t. IX, col. 750 ; S. Chrysostome, Exposit. in Ps. cxxxiv, n. 7, P. G., t. lv, col. 399 ; in Ps. cxliv, n. 1, ibid., col. 465. — 2. Dérivant de Dieu et se répandant sur l’homme et la nature, la bénédiction exprime la faveur divine, les dons et les bienfaits qu’elle apporte. Gen., xxviii, 4 ; xxxix, 5 ; xlix, 25, 26 ; Exod., xxxii, 29 ; Deut., xxxiii, 23 ; Ps. iii, 9 ; xxiii, 5 ; lxxxiii, 8 ; cxxviii, 8 ; Prov., x, 6, 22 ; xxxii, 18 ; Is., xix, 24 ; xuv, 3 ; lxv, 8 ; Ezech., xxxiv, 26 ; Joël, ii, 4 ; Eph., i, 3 ; Heb., vi, 7 ; S. Clément de Rome, 1 Cor., 31, dans Hilgenfeld, Novum Test, extra canonem, Leipzig, 1866, p. 35 ; Origène, Comment, in epist. ad Rom., . IX, n. 14, P. G., t. xiv, col. 1221 ; S. Hilaire, In Ps. lxvi, n. 2, 3, P. L., t. ix, col. 438 ; S. Chrysostome, Exposit. in Ps. cxiii, n. 5, P. G., t. lv, col. 311-312 ; In epist. ad Rom., homil. xxx, n. 1, P. G., t. lx, col. 662. — 3. Quand elle a pour but d’attirer les dons et les bienfaits de Dieu, la bénédiction devient un souhait, un vœu en faveur de celui sur qui on veut faire descendre les faveurs et les grâces divines. Gen., xxvii, 35 ; Eccli., ni, 10, 11 ; Heb., xii, 17 ; Jac, iii, 10. Cf. I Reg., xxiii, 21 ; xxvi, 25 ; II Reg., ii, 5 ; II Esd., xi, 2. Voir Dictionnaire de la Bible, Paris, 1894, t. i, col. 1580-1583.
2° Sens particulier dans lequel nous prenons ce mot ici. — Mais nous entendons parler exclusivement dans cet article de la bénédiction au sens liturgique, par conséquent de rites accomplis par les ministres sacrés au nom et par l’autorité de l'Église, soit pour consacrer des personnes ou des objets au service de Dieu, soit pour procurer aux fidèles de bons effets spirituels ou temporels. La bénédiction ainsi entendue se distingue de la simple prière ou supplication, faite par les ministres sacrés en leur nom privé ou même au nom de l'Église Comme dans la récitation du bréviaire. C’est l’exercice du pouvoir, conféré par l'Église à ses ministres, de bénir au nom de Dieu et de procurer par voie d’intercession publique des effets déterminés.
II. Existence du pouvoir ministériel de rénir. — 1° Dans l’ancienne alliance.
Dieu seul, dont l’empire
sur le monde créé par lui est absolu, peut produire réellement dans ses créatures animées ou inanimées les effets propres de sa bénédiction. C’est ainsi qu’il a béni la création entière, Gen., i, 22, 28, et après le déluge, Noé et ses fils, Gen., ix, 1 ; plus tard, il bénit spécialement Abraham, Gen., xii, 2, 3 ; XXII, 17 ; xxiv, 1 ; Isaac, xxvii, 16 ; Jacob, xxxv, 9 ; Laban, xxx, 27 ; les Israélites, Deut., i, 11 ; xii, 7 ; Ps. xxviii, II ; Putiphar à cause de Joseph, Gen., xxxix, 5 ; Samson, Jud., XIII, 21 ; Job, XLII, 12 ; le septième jour, Gen., il, 3 ; le pain et l’eau, Exod., xxiii, 25 ; les œuvres de Job, I, 10 ; la maison du juste. Prov., iii, 33, etc. Il a béni les chrétiens en JésusChrist et leur a accordé par lui toute sorte de bénédictions spirituelles. Eph., i, 3. Toutefois, le pouvoir de bénir, qui est essentiellement un pouvoir divin, a été communiqué par Dieu aux créatures qui le représentaient sur terre. Mais tandis que Dieu, en bénissant, produit directement et d’autorité propre les effets de sa bénédiction, ses représentants et ses ministres procèdent par invocation de son nom et par supplication. Jacob demande d'être béni par l'être mystérieux avec qui il avait lutté', et il reçoit la bénédiction demandée. Gen., xxxii, 26, 29. Il appelle sur les (ils de Joseph la bénédiction de l’ange qui l’a préservé dans ses malheurs.
Gen., xlviii, 16. Les patriarches eux-mêmes bénissent leurs enfants. Isaac bénit Jucob à la place d'Ésaii, Gen., xxvii, 4, 7, 10, 27, 31, 33-41 ; xxviii, 1-4. lacob bénit les fils de Joseph, en posant ses mains sur leur tête, Gen., xlviii, 9, 15, et tous ses entants, sur son lit de mort. Gen., xlix, 28. Moïse, lui aussi, bénit tous les Israélites avant de mourir. Deut., XXXIII, 1. Lors de la dédicace du temple, Salomon bénit tout le peuple assemblé. III Reg., viii, 14, 55-61. Balaam avait déjà béni Israël par ordre du Seigneur. Nura., xxiii, 11, 20 ; xxiv, 1.
Or, le pouvoir de bénir que Dieu accordait aux pères de famille et aux rois, il l’a conféré, dans l’ancienne loi, comme un pouvoir ordinaire à ses prêtres. Déjà Melchisédech, prêtre du Très-Haut, avait béni Abraham. Gen., xiv, 19, 20 ; Heb., vii, 1, 6. Et cette bénédiction était une preuve incontestable de la supériorité de Melchisédech sur Abraham. Sine ulla autem contradictione, quod minus est a meliore benedicitur. Heb., vii, 7. Le jour de sa consécration comme grand-prètre, Aaron bénit le peuple. Lev., ix, 22, 23. Ce ne fut pas un acte exceptionnel de son sacerdoce. Le Seigneur luimême en lit une des fonctions ordinaires du sacerdoce mosaïque. L’institution en est racontée. Num., vi, 23-27. En constituant l’office de bénir, Dieu indique la formule et l’efficacité de la bénédiction sacerdotale. Par la bouche de Moïse, il donne à Aaron et à ses fils l’ordre suivant : « Vous bénirez ainsi les enfants d’Israël et vous leur direz : Que le Seigneur te bénisse et qu’il te garde ! Que le Seigneur te montre un visage bienveillant et qu’il ait pitié de toi ! Que le Seigneur tourne vers loi son visage et qu’il te donne la paix ! Ils invoqueront donc mon nom sur les enfants d’Israël, et je les bénirai. » La formule de la bénédiction sacerdotale contient trois supplications, dans chacune desquelles le nom du Seigneur est invoqué, et elle assure aux Israélites la protection, la bienveillance divine et la paix, qui est, dans l'Écriture, le résumé de tous les biens, parce qu’elle permet d’en jouir tranquillement. F. de Hummelauer, Numeri, Paris, 1899, p. 58-59. Par là, le Seigneur conférait réellement et à perpétuité aux prêtres juifs le pouvoir de bénir le peuple. Deut., x, 8 ; I Par., xxiii, 13. Et cette bénédiction n'était pas une simple formule de prière ; elle avait une réelle efficacité, Dieu promettant absolument de bénir lui-même les enfants d’Israël sur qui son nom aura été expressément invoqué. Num., VI, 27. Voir Procope de Gaza, Comment, in Num., P. G., t. lxxxvii a, col. 808. Les prêtres et les lévites remplirent solennellement cet office sous le règne d'É/.échias. II Par., xxx, 27. Le grand-prètre Simon étendait les mains sur l’assemblée d’Israël pour la bénir. Eccli., L, 22. L’auteur de l’Ecclésiastique, xxxvi, 18, 19, demande que la bénédiction d’Aaron obtienne son efficacité. Le Seigneur lui-même par la bouche de Malachie, II, 2, avait menacé les prêtres juifs, devenus prévaricateurs, de tenir leurs bénédictions pour malédiction, s’ils ne voulaient pas remplir sérieusement leurs devoirs. Cf. Knabenbauer, Comment, in prupltetas minores, Paris, 1886, t. ii, p. 447.
D’après le Talmud, la bénédiction des prêtres juifs avait lieu chaque jour au Temple de Jérusalem au sacrifice du matin, et quand le Temple a été détruit, elle s’est continuée dans les synagogues à la prière du malin. Le jour du grand pardon, on la répétait à quatre reprises. Elle était prescrite par la loi, et elle ('tait obligatoire dans la prière du matin. Talmud de Jérusalem, traité Taanilh, IV, 1, trad. Schwab, Paris, 1883, p. 175-177. Elle se récitait en hébreu seulement. En province, les prêtres levaient la main à la bailleur des épaules, pour bénir le peuple, et au Temple, ils plaçaient les deux mains au-dessus de leur tèle ; toutefois, le grand-prètre ne les élevait pas au-dessus de sa tiare. Traité Sota, Vil, 2, 6, trad. Schwab, Paris, 1885, t. vii, p. 298, 308. Ils se