Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/475

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avec le maître d’hôtel de la duchesse qui s’appelait Bellegarde.

Maintenant écoutons son récit de ce qui advint le lendemain matin « Il (Bellegarde) me donna un sien serviteur à cheval pour m’accompagner à Lausanne, mais quand nous fûmes près Sainte-Catherine, sur le Jorat, voici le capitaine du château de Chillon, nommé messire Antoine de Beaufort, seigneur de Bières, qui était embûché dans le bois avec douze ou quinze compagnons, qui arrive sur moi ; je chevauchais lors une mule et mon guide un puissant courtaut, je lui dis : « Piquez, piquez ! » et piquai pour me sauver, et mis la main à l’épée. Mon guide, au lieu de piquer avant, tourne son cheval et me saute sus, et avec un coutel qu’il avait tout prêt il me coupe la ceinture de mon épée ; sur ce, ces honnêtes gens tombent sur moi et me font prisonnier de la part de Monsieur ; et quelque sauf-conduit que je leur montrasse, ils me menèrent lié et garotté à Chillon, et m’y laissèrent, sans autre que Dieu, subir ma seconde passion. »

On assure néanmoins, dit Moreri, que le duc n’avait point donné d’ordre de le prendre, mais il consentit à sa détention quand il eut été pris[1]. « Les deux premières années le prieur eut assez de liberté dans sa pri-

  1. Cela revient absolument au même, rien ne peut excuser un prince qui, manquant à sa parole, viole ou laisse violer un sauf-conduit qu’il a librement signé.