Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/512

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pourtant il y a encore quelque poésie autour de cette prose agricole : l’onde bleue clapote ou se brise sur des blocs noirâtres semés à peu de distance du rivage, tombés des cimes. Chillon surgit au loin avec son entourage d’Alpes au coloris violacé, brumeux ou empourpré, et en suivant de l’œil la courbe que décrit le bord du réservoir lémanique, on distingue Vévey, Clarens, Montreux, Le Boveret, Saint-Gingolph, Meillerie, et leur couronne dont les fleurons sont des pics dentelés, des dômes énormes, des obélisques gigantesques.

Quand le temps est à l’orage, quand le vent du midi soulève et fait onduler toute la surface de l’eau, quand des vapeurs ternes voilent le montueux horizon, le lac, vu dans sa longueur, du côté de Genève, rappelle les perspectives de la pleine mer.

Le premier village qui se présente, au sortir de Vévey, est celui de Saint-Saphorin, dans un site escarpé, peu favorable aux véhicules, et à l’entrée duquel le ruisseau écumeux du Forestay descend en sautillant parmi les roches, et apporte au Léman les eaux de son mystérieux frère et tributaire de la montagne : le petit lac de Bret, que l’on ne visite guère et qui se cache en des vallons dominés par la tour de Gourze[1].

  1. Et non pas de Goure (nom employé par erreur dans la 39e lettre du Rhin) ; je ne sais trop s’il faut attribuer la construction de cette tour aux Hongres, aux Sarrasins ou aux Romains — Le lac de Bret est un charmant vivier d’une lieue de tour, ovale, soli-