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CYBÈLE

Les préoccupations sinistres qui hantaient l’esprit de toutes les populations de Cybèle, étaient naturellement plus vives de ce côté de la planète que du côté opposé. On savait quelle hauteur définitive atteindrait le niveau du Grand Océan du Nord après le cataclysme. En ce temps-là, le caustique Voltaire eût été mal venu à plaisanter les savants au sujet des coquillages qu’ils trouvaient mêlés aux roches des montagnes, et à n’y voir quant à lui que de vulgaires écailles d’huîtres, jadis laissées là par des excursionnistes amis de la bonne chère.

Partout sur les hauteurs, on travaillait à élever de nouvelles immenses tours de Babel faites de murailles formidables et entourées d’ouvrages protecteurs capables de soutenir l’assaut de la marée suprême, de ces vagues de la dernière heure dont il était impossible de calculer d’avance le degré de furie. On vivait ainsi dans des transes mortelles, n’ayant de sûres en perspective que les quelques heures que mettrait l’électricité à devancer l’instant où aurait lieu l’effroyable débâcle australe. Et quand elle éclaterait enfin la terrible nouvelle, quel épouvantable tableau que ce sauve-qui-peut universel !


Or, ce qu’allait anéantir à jamais le fait brutal d’un brusque déplacement de l’élément liquide, c’était l’apogée de civilisation qu’avaient réalisé plus de cent siècles de travaux et de progrès