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CYBÈLE

— C’est que vous nous jugez à votre point de vue terrestre, mon ami, répondait Alcor. Vous sentez encore comme vous sentiez sur la terre, et n’avez pu de sitôt vous mettre à l’unisson des sentiments qui agitent les hommes de Cybèle. C’est comme si vous disiez que les Français de votre époque auraient besoin, pour se sentir vivre, d’un peu de l’insécurité et des misères de leurs ancêtres des âges préhistoriques. Ce qui est la satiété pour un sauvage, n’est même pas le nécessaire pour un civilisé et ce qui semblerait devoir combler les vœux les plus chimériques des débutants de la civilisation, n’est simplement que le terre-à-terre de la civilisation battant son plein. Tout n’est-il pas relatif ? Croyez bien que même dans les régions les plus élevées de la vie facile, les soucis, les chagrins, les passions ne manquent jamais aux hommes pour les pousser plus avant encore à la recherche d’un bonheur plus complet qui s’éloigne toujours davantage à mesure qu’on le poursuit.

Mais en attendant, quel philanthrope de l’époque de Marius n’eût tenu pour de généreuses mais irréalisables utopies, tout ce que ce dernier voyait mis en pratique comme choses courantes et si anciennes que les hommes d’alors ne comprenaient pas qu’il eût pu jamais en être autrement.

Ainsi, cette ancienne et si cuisante question du