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la Grèce et de l’Asie, ce sont des peuples innombrables et barbares, suivis de femmes, enfans, bagages, poussés vers l’Europe par le nord, le levant, le midi, qui fondent sur les pays comme la foudre, brûlent, pillent, dévastent ; avec aspect farouche, cruauté féroce, mœurs rudes, corps épais et robustes. Les citoyens de l’empire les prirent pour des hommes d’une nouvelle espèce ; leur langage faisait frémir ; leur mise, leurs armes étaient repoussantes ; ils se jouaient grossièrement de la vie et de la douleur ; quelques uns dépassèrent par leurs ravages et par leurs crimes tout ce qu’on avait encore connu.

Rome avait perdu sa domination : une religion la lui rend. Rome retrouve un empire universel, et prêche à ces masses débordées la fin du monde, qui les épouvante et les subjugue : une théocratie s’établit pour l’Europe entière, qui, soumise à cette première loi générale, se trouve engagée dans une voie commune.

Les peuples étaient venus en foule ; il leur fallut des siècles pour s’asseoir et se classer ; un long mouvement succéda à ce déplacement considérable. Qu’on juge la confusion de tels événemens ! Qu’on se représente les vainqueurs, les vaincus, les terres prises, partagées d’abord, réunies ensuite, données pour un temps, puis à vie, puis à toujours ! Qu’on s’imagine la quantité des lois et des réglemens ! Charlemagne trouve encore l’Europe dans une confusion qu’il augmente par ses conquêtes passagères ; au milieu des révolutions, la classification reprend sa marche : les vaincus relèvent la tête, les villes se fondent, des droits s’établissent, mille accidens hâtent ou retardent le cours naturel des choses. Aujourd’hui seulement nous dominons ces faits, nous sortons la tête des flots, mais quand on parle de la lenteur des gouvernemens, qu’on songe à ce qui a été fait jusqu’ici, au temps qu’il a fallu ! Chaque