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des barricades au bagne

quelconque, les citoyennes inspectent à leur tour les tiroirs et les placards. Tout à coup, l’une d’elles trouve une boîte d’une ornementation admirable ; elle l’ouvre : elle contient une boîte aussi jolie ; celle-ci en renferme une troisième. Elle appelle, on accourt, et, à la cinquième ou sixième boîte, on aperçoit deux menus objets : un morceau de drap et un autre de toile avec inscription suggestive : « Reliques du bienheureux X…, zouave pontifical, tué à Castelfidardo. »

Le morceau de drap avait appartenu à la culotte du zouave et le morceau de toile à la chemise de ce dernier. On s’expliqua alors la nervosité et la rougeur de la petite sœur.

Dans la perquisition faite au couvent de la rue des Carmes, on découvrit aussi des reliques d’espèce joyeuse. Le R. P. Monsabré, que nous sommes heureux de savoir encore en vie, est un grand collectionneur devant l’Éternel. Dans le cabinet où il recevait ses jeunes pénitentes, les seules, d’après le règlement qu’il avait élaboré, qui pussent y séjourner un certain temps, il avait rassemblé toute une collection de « souvenirs » qui eussent fait les délices d’un artiste capillaire.

Il n’y en a pas comme les moines pour avoir des idées folichonnes.

La laïcisation de la maison des sœurs de la rue Saint-Jacques, mitoyenne avec l’église Saint-Jacques-du Haut-Pas, provoqua une scène qui met en lumière l’esprit qui règne parmi ces dévotes personnes, qu’une fausse légende s’est trop longtemps plu à nous montrer débordant de sollicitude pour les déshérités, les meurtris de la vie.

Mis en garde par certaines manœuvres de ces bonnes dames, j’avais prié quelques citoyennes du Comité socialiste de m’accompagner et placé des gardes nationaux aux portes avec ordre de ne laisser sortir personne. Ces précautions prises, nous pénétrâmes dans l’établissement qui appartenait à la Ville mais que, comme tant d’autres, on avait depuis longtemps livré aux congréganistes, lesquels en avaient fait un ouvroir où agonisaient de malheureuses jeunes filles.

La directrice de ce saint atelier vint au-devant de nous :