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mémoires d’un communard

s’étaient heurtés, dès la nuit du dimanche 21, aux premières troupes versaillaises, fut une journée terrible. Le corps d’armée de Cissey, ayant vaincu la résistance rencontrée rue de Rennes et au carrefour Buci, poussait deux pointes sur le Luxembourg et le Panthéon par le quartier du Montparnasse, la rue de Vaugirard, le boulevard Saint-Germain, les rues de l’Ecole-de-Médecine, Monsieur-le-Prince et Racine. Les généraux Bruat, Lacretelle, Levassor-Soval, Paturel et Bocher vont se donner la main, nous écraser.

La veille, on avait arrêté l’ennemi devant les rues Vavin et Bréa, et à la gare Montparnasse, mais il avait pu gagner du terrain par le bas du Sixième, mollement défendu. Aux rues Vavin et Bréa, les combattants faisaient rage. Les turcos de la Commune, les chasseurs fédérés, le 151e du Ve et, une batterie d’artillerie se battaient comme des lions et, contre leur intrépidité, venaient se briser les efforts des régiments de M. de Cissey, qui, soit dit en passant, demeurera beaucoup plus célèbre pour ses accointances avec la Kaulla que pour ses hauts faits de guerre. De ce côté donc, et jusqu’au mercredi, l’ennemi ne fera pas un pas vers le Luxembourg. Cependant, il se peut déployer en éventail et, en partie, nous déborder, grâce à notre petit nombre.

Nous devons, malgré tout, quitter les barricades Vavin et Bréa, où tant de citoyens héroïques sont tombés, et nous replier au delà du Luxembourg, où, déjà, apparaissent les soldats de la colonne opérant rue de Vaugirard et vers l’Odéon.

Les ambulances du boulevard Saint-Michel sont en feu. Nos hommes se jettent dans les rues du Val-de-Grâce, Gay-Lussac et Royer-Collard. Durant ce temps, le 119e sédentaire, placé par moi mi-partie à la Bourbe et mi-partie au Val-de-Grâce, les abandonne sans ordres.

J’appris, un peu plus tard, qu’un faux colonel de la Commune, avec une audace devant laquelle je m’incline, était parvenu à faire se retirer les gardes nationaux qui les occupaient.

Cet abandon oblige les fédérés qui luttent rue du Val-de-Grâce et gênent énormément le mouvement en avant de l’armée à travers le Luxembourg, de se rabattre vers le Panthéon par la rue Saint-Jacques.