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des barricades au bagne

Rue des Ecoles, à la hauteur de la rue Saint-Jacques, on se bat vigoureusement ; il en est de même boulevard Saint-Germain, au coin des rues Saint-Jacques et Domat, où la première compagnie du 118e, rentrée de la Grange-Ory depuis la veille, a été confiée à mon frère, le capitaine Férino ayant disparu. Mon frère tiendra tant et si longtemps que, si le citoyen Lisbonne ne l’eût avisé de la situation, il en était fait de lui et des vaillants qui combattaient sous ses ordres.

Le restant du bataillon était parti au Onzième.

Décidément, les gens sur lesquels mon frère et moi avions le droit de compter, se comportaient bien étrangement à notre égard, ce qui me fait croire qu’il est des amitiés fort dangereuses.

Nous avons dit que Montmartre, aussi mal défendu par la Commune qu’utilement occupé par les Versaillais, bombardait les quartiers de Paris où l’on se défendait encore. C’est ainsi que le Panthéon, le Collège de France, le boulevard Saint-Germain, la place Maubert, etc., étaient l’objet de ses attentions brutales. Rue Boutebrie, où se trouvait l’ambulance des frères Miot, placée sous la direction de ma dévouée compagne, plusieurs personnes sont blessées ou tuées ; de même rue du Sommerard, dans cent autres endroits.

Des quais à la rue Gay-Lussac, et de cette rue à la rue de Lourcine, ce qui forme comme une équerre, quelques centaines de fédérés arrêtent encore tout un corps d’armée, mais le malheur veut que le centre de Paris s’abandonne, que les membres actifs de la Commune aillent d’eux-mêmes se cantonner au Onzième, aidant ainsi à l’enveloppement, à l’étouffement fatal des forces insurrectionnelles, et, malgré notre désir contraire, nous devrons, affaiblis par la bataille et les départs incessants vers le Onzième, céder le terrain, arrosé du sang le plus généreux. Cependant la minute suprême n’est pas encore venue, et il est, de par ces rues du Cinquième, des énergies invaincues.

Par les rues des Carmes et de l’Ecole Polytechnique, je gagne le haut de la Montagne Sainte-Geneviève, dont le bas est dégarni de défenseurs ; sur la place, où se trouve une barricade qui commande la montée, des gens sont occupés à la démolir. Mon arrivée les trouble