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Page:Allemane - Mémoires d’un communard.djvu/193

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mémoires d’un communard

sac et de corde ; affolant, terrorisant les malheureux qui tombaient sous sa coupe. Entre cent autres ignominies, il s’était plu à torturer, à rendre fou le citoyen Benoist, ex-délégué de la Commune à la mairie du septième arrondissement.

Ayant appris que Benoist avait une fille de dix-sept ans, il lui imputait — malgré qu’il sût que l’enfant était demeurée très honnête — de l’avoir jetée au ruisseau. Il l’accusait, en outre, d’avoir participé à l’incendie de la Légion d’Honneur, quand il était établi que le citoyen Benoist, blessé avant l’entrée des troupes gouvernementales dans Paris, c’est-à-dire vers le 19 mai, se trouvait à l’ambulance de la rue de Malte au moment même où le feu dévorait la Légion d’Honneur.

En faisant condamner à mort le père, quels desseins nourrissait donc ce triste personnage envers la fille ?

Instruit par son confrère Edmond Goupil, qui se trouvait à l’infirmerie de la prison en meme temps que Benoist, le docteur de la Maison de Correction avisa de l’incident le chirurgien qui avait soigné la blessure de Benoist, et cet honorable praticien parvint à faire reviser le premier jugement et à sauver Benoist de la mort.

Tels étaient les hauts faits qui valaient à Demoignaux de la Salle l’amitié d’Appert et de Gaillard.

Notre première rencontre fut marquée par un échange d’aménités qui nécessita l’intervention de M. Boucher. Il devait en être à peu près ainsi à chacune de nos entrevues.

J’avais appris, par mon ami Eyraud, ex-sergent dans le même régiment que Demoignaux de la Salle, que ce dernier avait été mêlé à des histoires de « grenouilles », mangées, pour le plus grand dommage de l’ordinaire des soldats. Or, à la première occasion qui me fut offerte, je ne manquai pas d’en entretenir mon vertueux capitaine-rapporteur. Il y eut ce jour-là un beau tapage en la chambre où se déroulait cette étrange instruction.

Hors de lui, Demoignaux me promit le poteau de Satory ; je lui parlai alors du rôle glorieux que sa vaillance l’incitait à jouer, de sa noblesse d’attitude et de langage, ajoutant que, parmi tant d’officiers-rappor-