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des barricades au bagne

servira de prison. L’appel se poursuit et, déjà, de nombreux condamnés ont embarqué, lorsque j’entends l’adjudant crier :

— 277, embarquez !

C’est mon numéro de bord ; 24.328, mon numéro de bagne, n’existe plus. Je saute dans le chaland, où le 276 vient de me précéder et, la quantité réglementaire de passagers atteinte, le chaland est dirigé vers le navire, dont les hautes cheminées laissent échapper une fumée noire, épaisse.

Sur le môle, de nombreux curieux assistent à notre départ. Quelques chapeaux s’agitent ; je me lève et salue ces amis inconnus qui, ne pouvant faire davantage, adressent du moins un dernier adieu aux tristes épaves de la Révolution du 18 mars 1871, en route vers les bagnes lointains.

CHAPITRE VII
à bord. — nos nouveaux gardiens. — le capitaine d’armes. — pêcheurs espagnols. — la baie d’alméira. — dakar. — les lieutenants delaruelle et jean bart. — le gendarme boysset. — sous la ligne. — la soif. — le scorbut. — sainte-catherine. — la mort du requin. — nouméa.

Nous abordons le Rhin, et, un à un, nous défilons devant le commandant et l’officier de quart ; puis, le capitaine d’armes et des surveillants militaires (nos nouveaux gardes-chiourme), uniforme flambant neuf, nous indiquent la cage où nous devons nous rendre.

Les cinquante condamnés de la Commune sont placés à tribord et classés, cinq par cinq, dans les dix premiers plats : c’est là le mode maritime de classement. Malgré noire mélange avec les forçats de droit commun, nous avons la satisfaction grande d’être emprison-