dans ma case et, après qu’un correcteur eut ouvert ! a grille et appelé mon numéro, je les quittai en leur souhaitant de ne pas trop souffrir et de faire provision de courage.
Le correcteur me conduisit au bureau du bagne où, vu sans doute l’heure matinale, ne se trouvaient que des écrivains-forçats. On établit ma mutation, et le correcteur, muni de la feuille de transfert, me mena au quai.
De nombreux condamnés s’y trouvaient dé à rassemblés ; les uns appartenaient aux équipages des chaloupes pénitentiaires amarrées devant nous, les autres partaient dans divers détachements. Quelques surveillants se tenaient également près des chaloupes. Mon conducteur se dirigea de leur côté et je le suivis.
Cet individu devait, plus tard, gravir l’échelon qui le séparait du sommet où l’infamie connaît le vertige. Il répondait — les correcteurs et le bourreau gardant leur nom — à celui de Mayer.
Abordant le surveillant qui me devait emmener vers Nouméa, il lui dit avec cet accent particulier aux Alsaciens :
— Foici le 4.486, qui fa à Montrafel ; c’est un gommunard !
— Bien ; j’aurai l’œil sur lui.
Le correcteur se retira souriant, pendant que mon chiourme m’ordonnait d’un ton rogue de m’approcher d’une des chaloupes.
L’ordre du départ est donné ; je saute dans la chaloupe qui m’a été indiquée par le surveillant et m’asseois aux côtés d’un condamné qui, ainsi que moi, a été désigné pour le détachement de Montravel. Au courant des choses et des gens du milieu, il me dit que le chiourme qui nous conduit s’appelle Sarron ; qu’il m’en apprendra davantage plus tard, mais que j’aie à m’en méfier.
La recommandation était plutôt inutile.
Nous débarquons devant Nouméa dont les quais sont à peine ébauchés. Il est vrai que la main-d’œuvre est gratuite et nombreuse, mais on ne peut cependant faire tout à la fois, et il n’y a que vingt-trois ans que le pavillon du peuple le plus spirituel de la terre flotte sur
