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des barricades au bagne

Je sortis de la Direction avec l’angoissante conviction que j’allais subir la « question », c’est-à-dire la torture des poucettes.


CHAPITRE IV
RETOUR A l’ILE NOU. — LA CELLULE ET LA PRISON. — CHEZ LE BOURREAU LEDOUX. — LE JARDIN DE LA TRANSPORTATION. — LE CONTREMAITRE DEVOS. — L’ÉVASION DE LEDOUX. — LA FERME-NORD. — LE FORÇAT BESANÇON. — LE COTRE ÉCHOUÉ.

Pendant que se faisaient les apprêts du départ du canot, je songeais à la perte des dernières espérances qui me demeuraient et comme un déchirement se produisait en moi. N’avais-je pas assez de soucis, de difficultés et avais-je besoin d’y ajouter, en commettant des imprudences comme celle qui me valait d’être ramené à l’île Nou ? Est-ce que Berlin et Annoy se donnaient tout ce mal ? Décidément, je n’étais qu’un niais, et, à force de toujours me préoccuper des autres, je finirais par crever comme une bêle après laquelle tout le monde s’acharne, quand, plus égoïste, j’aurais pu, sinon déjà m’évader, du moins continuer de travailler à l’imprimerie et profiter d’une occasion favorable si elle se présentait.

Et maintenant, que va-t-il m’advenir ? Vais-je être livré au bandit Charpyat, le surveillant-inquisiteur ? Est-ce, au contraire, le martinet qui m’attend ?…

— 4.486, sautez dans le canot !

Mes poignets toujours emprisonnés, j’obtempère à l’ordre qui m’est donné et, moins de troisquarts d’heure après, notre embarcation accostait au petit embarcadère situé presque en face la demeure de l’aumônier. Sans s’arrêter au bureau principal, les surveillants me conduisirent au quartier cellulaire et me placèrent sous