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Page:Allemane - Mémoires d’un communard.djvu/67

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mémoires d’un communard

sont parvenus à se « distinguer » de leurs concitoyens. Les mânes de Wilson en tressailleraient d’aise.

Cette griserie fut néfaste à la Commune, car elle amusa trop longtemps les Parisiens, en même temps qu’elle déconsidérait le mouvement insurrectionnel, ce dont la réaction ne manqua pas de tirer tout le profit possible.

Durant que Paris, tel un enfant insouciant du lendemain, chantonne Foutriquet et s’esbaudit aux parades communalistes, Thiers, son ennemi implacable, négocie avec Bismarck et Guillaume, dont il obtient — ô combien facilement ! — la libération des prisonniers de Metz et de Sedan.

Grâce à l’arrivée de ces contingents, déjà dressés contre le peuple, de nouveaux régiments de gendarmerie sont créés et permettent d’encadrer l’armée hâtivement reconstituée.

De partout affluent, du reste, de nouveaux défenseurs de l’ordre : les ports de guerre envoient leurs compagnies de fusiliers-marins, leurs bataillons d’infanterie coloniale : comme en juin 1848, les ruraux accourent, aussi les chouans, pour écraser la cité révolutionnaire.

C’est un second siège qui s’organise, mais cette fois c’est par des Français contre d’autres Français. Le Passé s’apprête à étouffer l’Avenir.

L’esprit assombri par ces réflexions, je gagne la mairie du Ve, où je rencontre les nouveaux élus de la Commune : Ledroyt, Blanchet et Régère de Montmore. Ce dernier a été choisi comme maire ; il m’est à peu près inconnu. Son seul titre est d’avoir été impliqué dans le procès qui suivit la manifestation du 31 octobre 1870.

Les délégués ou adjoints sont les citoyens Aconin, jeune licencié en droit, et Muraz (dit Murat), ex-employé au Bureau des longitudes.

La légion se trouve sous le commandement d’un sieur Blin, dont les antécédents militaires ou civiques sont complètement ignorés de tous. D’où vient cet homme, dont on a fait un colonel de légion, ce qui correspond au grade de général de brigade ? Tout le monde l’ignore, excepté probablement le gouvernement de Versailles. On dit qu’il a été placé là par Lullier et que Régère l’y maintient.