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des barricades au bagne

de l’établissement. A ma vue, les élèves se levèrent et un grand cri de : « Vive la Commune ! » emplit de bruit toutes les classes.

Je remerciai les enfants et les maîtres, leur exprimai mon contentement et leur fis la promesse de les revoir.

Hélas ! je revins, en effet, rue Rolün, mais cette fois le fusil au poing : l’ennemi était dans le quartier, et, au lieu de s’occuper à préparer l’avenir, en veillant sur les enfants, il fallait défendre le présent en abattant des hommes !

La laïcisation des écoles étant un fait accompli, on songea à l’organisation de l’enseignement professionnel. Diverses conférences, auxquelles assistèrent les citoyens André et Dacosta père, tous deux membres de la Commission de l’Enseignement, eurent lieu à la mairie. On y décida que l’établissement possédé par les Jésuites, sis rue Lhomond, servirait pour une première expérience et, grâce à la louable activité du citoyen André, un jeune et hardi savant, que les balles versaillaises devaient enlever à la Révolution sociale, quelques jours suffirent pour qu’on en pût saluer le fonctionnement.

Il ne demeurait plus qu’à perfectionner, à parachever l’œuvre.

Pris par d’autres soucis, je ne pus suivre cette nouvelle création en son développement, qui, du reste, fut tôt arrêté : l’école s’ouvrait à peine que Paris se trouva envahi.

Quoi qu’il en soit, l’idée survécut au massacre et, quelques années après la chute de la Commune, les cantines scolaires et l’enseignement professionnel reconquéraient leur droit de cité. C’était, en partie, la revanche entrevue par ceux qui se refusent à désespérer, quelque complète que paraisse la victoire de la réaction.

Un crime venait d’être commis sur le boulevard Saint-Michel : près du café de la « Source », trois gardes nationaux, traîtreusement assaillis par une bande de souteneurs, que la Commune rendait furieux, avaient été assassinés. Les cadavres de ces malheureux citovens avaient été tout d’abord transportés au poste du Panthéon.