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Page:Alletz - Discours sur la république de Venise.djvu/7

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firent une loi qui exempta de saisie et d’hypothèque tous les titres qu’elle avait émis : La monnaie dont cette banque usa pour payer ses créances fut d’un plus fin aloi que l’argent courant, et elle acquitta fidèlement, au jour de l’échéance, les dettes mutuelles des particuliers.

Dans la crainte que le commerce de terre ne prévalût sur le maritime, il fut interdit aux sujets de la république d’exporter eux-mêmes leurs marchandises au-delà des Alpes. Les écueils qu’ils trouvaient au sortir de leur port, et l’agitation souvent périlleuse de l’Adriatique, les rendirent tous marins, nourrirent leur courage et firent la sûreté de leur ville déjà inaccessible par terre. Forcés dans leur pauvreté première à vivre de pèche, à chercher assez loin les objets de première nécessité et à faire la main-d’œuvre pour le compte d’autrui, ils s’étaient exercés aux constructions navales dont le bois leur était fourni par les côtes de l’Adriatique, et l’usage qu’ils firent, pour les combats sur mer, des grands vaisseaux, les aida beaucoup à triompher, à la longue, des Génois, durant une lutte acharnée qui dura plusieurs siècles, comme aussi à résister à l’empire ottoman. Ayant l’œil sur tout procédé qui valait la peine d’être imité, ils s’aperçurent que les navires bayonnais remportaient sur les leurs par certaines qualités jusqu’alors ignorées : eux de couper aussitôt leurs bâtiments sur ce modèle. L’architecture navale des Grecs leur fut aussi une leçon : à peine établis en Orient, ils mirent cette conquête au rang des plus considérables qu’ils y pussent faire. La réputation de leur supériorité dans la construction des vaisseaux survécut à la décadence de leur commerce ; car ce fut leur ville que, vers la fin du dix-septième siècle, Pierre-le-Grand donna pour école à ses jeunes officiers.

Pour montrer que la vraie force de la nation était la ma-