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élevée comme le ciel. Les déserts de l’Arabie semblent moins étendus et moins silencieux que le Colysée, où l’on aurait peur d’être seul, face à face avec ce qu’on y rêve. Sortez-vous de la ville, les lignes majestueuses de l’horizon et les champs partout incultes et solitaires ajoutent à cette disposition de l’âme (1). Ces monuments, restes des siècles, des barbares et des révolutions, attestent la victoire que l’art des hommes a remportée sur le temps. Que dis-je ? peut-on appeler triomphe ce qui ressemble plutôt à un pardon accordé au génie par la destruction ? Rome est un champ de bataille où l’on dirait que ce qu’il y a de plus admirable a dû son salut à sa beauté. Il y a tel monument qui a vu passer à ses pieds plusieurs milliers d’années : nous avons pour cette relique vénérable le même respect que pour une œuvre impérissable de la création. On serait tenté à Rome de se faire illusion, et de se regarder soi-même à l’abri des effets du temps. La religion qui y tient les clefs du tombeau vous excite à nourrir des espérances qui font oublier mieux encore le courant impétueux de l’âge (2). En ce lieu tout parle de la puissance divine, et tout rappelle la puissance humaine. Qui ne se sentirait

(I) Idée d’infini. (2) Idée de puissance.