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été est la seule grandeur qui lui reste il n’a plus de charges à remplir, d’ordres à donner, de succès à obtenir, il ne compte plus dans l’État ; le monde va sans lui. Placé au rang des spectateurs, il nourrit en secret je ne sais quelle surprise de ce qu’on se passe si aisément de ses talents et de ses services. D’autres ont pris sa place ; la patrie est encore florissante ; il est rare qu’on vienne troubler le repos de ses vieux jours, en lui demandant des conseils. Voilà ce qui le rend quelquefois chagrin dans ses jugements sur les hommes et sur les choses qu’il contemple du fond de sa retraite (1).

Cette paix sous le poids des ans est le supplice des âmes fortes qui ont toujours agi : malheur à ces vieillards qui ne peuvent se résigner ! Ils regrettent jusqu’aux soucis dévorants, et s’ennuient de manquer d’orages ; ils pleurent les faux biens dont ils n’ont jamais joui, et, chose étrange ! pour se venger de ne plus occuper l’attention publique, on affecte le mépris de l’opinion faute d’exciter du bruit dans le monde, on parle de finir dans un couvent, et, de dépit de se trouver seul, on se fait bâtir d’avance son tombeau (2).

D’autres cherchent le bonheur dans la continuité des habitudes ; ils se font des manies qui rem-

(1) Idée de puissance. (2) Idée d’activité.