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Page:Allier - Le protestantisme au Japon, 1908.djvu/43

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Après 1873, les pouvoirs publics ne cessèrent d’aller dans le sens d’une liberté toujours plus grande. En 1880, ils firent mine de s’orienter vers ce que nous appelons la séparation des Églises et de l’État. Le ministère des cultes fut supprimé et ses services rattachés à ceux du ministère de l’intérieur. C’était un coup très grave porté aux prétentions du chintoïsme considéré comme religion d’État. La situation officielle de ses prêtres était ébranlée et déjà diminuée ; l’on commençait, sinon en droit, du moins en fait, à se passer, pour les enterrements chrétiens, de leur présence. La bataille n’était pourtant pas entièrement gagnée. Le gouvernement, dirigé par les conservateurs, était loin de voir sans crainte la fièvre d’innovations qui secouait le pays.

    Verbeck explique, vers cette époque, à son comité de l’Église réformée hollandaise d’Amérique, dans une lettre qu’il faudrait citer tout entière. On lui avait écrit des États-Unis l’étonnement et, pour dire le mot, le scandale que ces tergiversations officielles provoquaient. Verbeck répond : « Tout ce que vous m’avez écrit, je le ressens moi-même profondément. Oui, le temps me paraît long, et il m’arrive de murmurer : jusques à quand ?… Parfois le but semble tout près d’être atteint ; et puis, soudain, il recule encore. L’intolérance religieuse nous paraît si dépourvue de sens et si détestable que nous ne pouvons nous figurer qu’elle soit capable de durer. Et pourtant, quand je pense à la masse énorme de difficultés politiques, diplomatiques, financières et autres, devant lesquelles se trouve ce gouvernement, je comprends que la liberté religieuse l’effraie et qu’il y voie une cause possible de dangers infinis. Soyons donc patients. II nous suffit, pour l’instant, de prouver que nous sommes des hommes honorables, sans arrière-pensée. Ne laissons pas échapper une occasion de nous assurer une bonne influence et une bonne réputation. Ce nous sera une force, le jour où le travail direct de l’évangélisation nous sera permis. »