à l’école élémentaire, et dès la première année, tout comme les professeurs laïcs de Montréal l’entendent, aujourd’hui, et cette proposition du brillant, patriote nationaliste ne souleva aucune récrimination, bien que l’ensemble de son projet fût vivement discuté.
D’où est donc venue cette espèce d’évolution à recul de l’école nationaliste ? Il paraît que le mauvais coup de barre a été donné dans l’Action Française du mois d’août 1919, par le R. P. Dugré. s. j. Son article, subtil comme un beau sophisme bien brossé, a fait son petit tour de presse, et le truc était joué. Il s’agissait, assure-t-on, de mousser un peu les affaires des « irréductibles tenants de la vieille culture classique. » Sans faire semblant, de rien, le Père disait en passant : « un grand nombre d’éducateurs, surtout dans les collèges commerciaux, ont résolument sacrifié, par inconscience ou parti pris, une part considérable de la tradition française. » Ouvrons ici, une petite parenthèse.
« L’inconscience, » dont parle le R. P. n’est pas l’apanage exclusif des éducateurs des collèges commerciaux… Il appert que les illuminés de l’Action Française en sont abondamment pourvus, à moins que ce soit le « parti pris » de la mauvaise foi comme il paraît bien dans leur édition d’octobre 1920, où, tout en protestant que leur mémoire au Conseil de l’Instruction publique ne contenait aucune attaque contre les Frères, ils reproduisent ce mémoire où l’on montre les collèges commerciaux de nos grands centres accomplissant une œuvre déplorable et, se faisant l’agent de la corruption de notre langue… Puis, dans une autre page ils recommandent fortement à leurs lecteurs l’élucubration que M. Asselin a commise dans « La Rente » du 1er octobre. Si, en bon français, cela ne s’appelle pas de la mauvaise foi, je n’y entends plus rien…
Et donc, depuis le mois d’août 1919, le bilinguisme est en baisse dans l’école nationaliste. On ne s’y déclare pas ouvertement opposé ; on se contente de dire que si les firmes canadiennes-françaises veulent des employés parlant la langue de Shakespeare pour plaire à leurs clients anglais, ils n’ont qu’à se procurer des employés anglais ou irlandais ; et que les établissements anglais n’auront qu’à agir d’une manière analogue pour servir leur clientèle canadienne-française. — Comme utopie, c’est un beau modèle.. Quelle maison sérieuse se souciera des services d’un employé qui ne sera pas familier avec la langue de l’établissement ?…
On ne s’oppose pas, par ailleurs, à l’étude de la langue anglaise à l’école : on daignera l’agréer au cours moyen… Ce qui signifie que la moitié, au moins de nos enfants n’en auraient aucune notion et que les autres, comme dit La Bruyère, « consumeraient à la recherche de cette langue le même temps qui devrait être consacré à l’usage que l’on doit en faire. »
Dans une de ses chroniques, M. Léo-Paul Desrosiers, disait il y a quelques semaines, que ce qui nous manque le plus à l’heure actuelle,