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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

— Dont le plafond est charmant, ajouta Modeste Vidal, aux yeux de qui les manifestations de l’art primaient tout.

— L’oratoire de la reine et son cabinet de travail, poursuivit Jean.

— Où il y a de ravissantes boiseries, dit encore le musicien.

— Enfin nous avons vu la tour des Moulins et ses oubliettes ; vous savez, m’sieu, on faisait culbuter les gens tout vivants dans un puits profond, une trappe s’ouvrait, crac !… et on n’entendait plus jamais parler du malheureux.

— Je sais, je sais, dit M. Pascalet en souriant.

Les touristes redescendirent vers la ville, et M. Pascalet eut plus d’une occasion de faire remarquer à ses jeunes amis, qu’à Blois l’art est partout : dans les monuments comme dans les demeures les plus modestes. Le goût y est épuré par la vue de chefs-d’œuvre de la Renaissance, épanouis en une éclatante floraison. Les châteaux, les églises, les vieux hôtels, sont construits avec une pensée, un style, une intention, et sont des livres où, dès l’enfance, chacun épelle la langue du beau. Un simple maçon sait éfiler un toit, espacer des fenêtres, découper un pignon, tracer un cordon sous des poutres, et jusque dans les villages, sur la façade des chaumières, se glisse comme une vague réminiscence des formes inconsciemment étudiés, et se retrouvent les traces du génie d’une merveilleuse époque.

Une ville qui possède, — outre son château, — dans ses environs des joyaux tels que Chambord, Chaumont, Chenonceaux, Cheverny, Amboise, Azay-le-Rideau, Ussé, Langeais, Moncontour, est naturellement ouverte aux initiations artistiques les plus délicates. Si l’on envoyait des élèves s’instruire en Touraine, on formerait des architectes habiles à marier la beauté des lignes aux convenances de la destination, chose assez difficile à réaliser.

— Demain, ajouta M. Pascalet qui s’était complu à développer ces idées, nous irons au château de Chaumont, le plus beau de tous ceux qui sont autour de nous, par le site qu’il occupe. Vous verrez qu’il commande une admirable vue sur la plaine, le fleuve, les bois et les coteaux. Aujourd’hui, nous n’aurons pas trop des heures qui nous restent, pour prendre une idée de la ville et du caractère des gens du pays. Blois doit compter un peu plus de vingt mille habitants ; il y a ici et aux environs quelques fabriques de draps, de cotonnade, d’étoffes de laine et de molleton ; il y a des papeteries et aussi des vinaigreries qui ne le cèdent en rien pour la renommée de leurs produits à celles d’Orléans.

» Laissez-moi vous dire que des princes sont nés à Blois qui ont tenu une