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fièrement indépendante, cette conception souveraine de la dignité humaine, cette possession actuelle de l’univers et de l’infini, cette émancipation parfaite de tout ce qui se passe, ce sentiment calme de sa force et de sa supériorité, cette énergie invincible de la volonté, cette infaillible clairvoyance en soi-même, cette autocratie de la conscience qui s’appartient, toutes ces marques d’une vigueur de lion, tous ces signes décisifs d’une royale personnalité, d’une nature olympienne, profonde, complète, harmonique, pénètrent l’esprit de joie et le cœur de reconnaissance. Voilà une vie ! voilà un homme ! Ces perspectives ouvertes sur l’intérieur d’une grande âme font du bien. À ce contact, on se restaure, on se retrempe, et quelle époque en eut plus besoin que la nôtre, âge sans convictions et sans caractères ? Le courage revient par la vue. Quand on voit ce qui a été, on ne doute plus que cela puisse être. Quand on voit un homme, on se dit : Oui ! soyons homme !

LXXXII. — SAINTETÉ ET SANTÉ.

« Une vertu sortait des vêtements de Jésus. » Pourquoi la piété, santé souveraine, harmonie de l’âme avec Dieu, ne serait-elle pas sœur de la santé, harmonie de l’âme avec la nature ? La santé est l’état normal, et l’état normal c’est au fond l’état divin. La sainteté répand autour d’elle une atmosphère vivifiante qui guérit, restaure, fortifie l’homme entier. Toute religion sincère fait des miracles : tous les saints sont thérapeutes. Quand