Page:Anatole France - Autels de la peur.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

C’était Rose, la fille du guichetier qui venait lui parler en secret.

Après avoir repoussé pendant plusieurs jours les offres de Marcel, elle avait cédé.

Elle était prête à sauver la jeune femme par les moyens convenus entre elle et l’ami de Fanny.

— Citoyenne Avenay, dit-elle, demain soir, un homme qui t’aime t’attendra sur l’avenue de l’Observatoire avec une voiture. Prends ce paquet, il contient des vêtemens pareils à ceux que je porte ; tu t’en revêtiras, dans ta chambre, pendant le souper. Tu es de ma taille et blonde comme moi. On peut de loin, nous prendre l’une pour l’autre. Un gardien, qui est mon amoureux et que nous avons mis dans le complot, montera dans ta chambre et t’apportera le panier avec lequel je vais aux provisions. Tu descendras avec lui par l’escalier dont il a la clef et qui conduit à la loge de mon père. De ce côté, la porte n’est ni fermée ni gardée. Il faut seulement éviter que mon père te voie. Mon amoureux se mettra le dos contre le carreau de la loge, et il te parlera comme à moi. Il te dira : « Au revoir, citoyenne Rose, et ne soyez plus si méchante. » Tu t’en iras tranquillement dans la rue. Pendant ce temps je sortirai par le guichet principal et nous nous rejoindrons toutes deux dans le fiacre qui doit nous emmener.

Fanny regarda avec surprise la fille du porte-clefs et lui demanda la raison d’un si grand dévouement.

— C’est, lui répondit Rose en oubliant