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Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/156

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relevé sur le chapeau et flottant autour de sa tête comme un nuage funèbre, elle était plus belle que jamais et une volupté calme s’exhalait de toute sa personne. Un clapotement d’hélice s’approcha et grandit. Le ponton des bains oscilla légèrement, et un bateau-mouche, allant au Point-du-Jour, passa devant elle si près qu’elle entendit les voix des passagers. Deux jeunes gens, d’allure vulgaire, appuyés aux bordages du pont, la lorgnèrent avec une intention libertine, en songeant, sans doute, à sa toilette qu’elle allait défaire.

Elle les remarqua. Elle entendit l’aîné des deux, qui était blond, avec des plaques rouges sur la face, dire à son camarade :

— La belle femme ! on se la…

Mais déjà le bateau passait, cheminée abaissée, sous l’arche du Pont-Royal.

Fut-ce dédain ou contentement ? les coins de sa lèvre se soulevèrent et commencèrent un sourire.

Elle était calme ; son regard, flottant, très doux, sans inquiétude. Elle releva ses beaux bras par un geste gracieux qui eût troublé bien des hommes,