Page:Anatole France - L’Anneau d’améthyste.djvu/69

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Il ajouta d’une voix plus basse et plus grave :

— Il ne me reste qu’à émettre cette maxime qu’il faut considérer, en fait d’hommes, la qualité préférablement au nombre et s’attacher à former des corps d’élite. En exprimant ces idées, je suis sûr de n’être démenti par aucun grand capitaine. Mon testament militaire est contenu dans cette formule : « Le nombre n’est rien. La qualité est tout. » J’ajouterai que l’unité de direction est indispensable à une armée, et que ce grand corps doit obéir à une volonté unique, souveraine, immuable.

Il se tut. Le regard de ses yeux pâles était noyé de larmes. Des sentiments confus, inexpliqués, envahissaient l’âme de cet honnête et simple vieillard, le plus beau capitaine, jadis, de la garde impériale, malade maintenant, usé, perdu comme dans une forêt au milieu de ce monde militaire nouveau qu’il ne comprenait pas,