Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/117

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croit au thé de la rue de Rivoli. Nous dînons ce soir chez les La Verdelière. Allez-vous-en vite, monsieur Arcade. Il faut que je m’habille : je n’ai pas une seconde à perdre.

L’ange répondit qu’il se ferait un devoir d’obéir à madame des Aubels s’il était en état de se montrer décemment en public, mais qu’il ne pouvait songer à paraître dehors sans aucun vêtement.

— Si j’allais nu dans la rue, ajouta-t-il, j’offenserais un peuple attaché à ses habitudes anciennes, qu’il n’a jamais examinées. C’est le fondement des mœurs. Autrefois, les anges, comme moi révoltés, se montraient aux chrétiens sous des apparences grotesques et ridicules, noirs, cornus, velus, coués, les pieds fourchus, et parfois avec un visage humain sur le derrière. Pure niaiserie !… Ils étaient la risée des gens de goût, ne faisaient peur qu’aux vieilles femmes et aux petits enfants, et ne réussissaient à rien.

— C’est vrai qu’il ne peut pas sortir comme il est, dit équitablement madame des Aubels.

Maurice jeta au messager céleste son pyjama et ses pantoufles. Comme habits de ville, ce